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Comment le monde fut créé d'une goutte de lait
Au commencement, il y avait une énorme goutte de lait
Alors vint Doondari, et il créa la pierre.
Puis la pierre créa le fer;
Et le fer créa le feu;
Et le feu créa l'eau;
Et l'eau créa l'air.
Puis Doondari descendit pour la seconde fois. Et il prit les cinq éléments.
Et il en modela l'homme.
Mais l'homme était fier.
Alors Doondari créa la cécité, et la cécité vainquit l'homme.
Mais quand la cécité devint trop fière,
Doondari créa le sommeil, et le sommeil vainquit la cécité;
Mais quand le sommeil devint trop fier,
Doondari créa l'ennui, et l'ennui vainquit le sommeil;
Mais quand l'ennui devint trop fier,
Doondari créa la mort, et la mort vainquit l'ennui;
Mais quand la mort devint trop fière,
Doondari descendit pour la troisième fois,
Et il vint sous les traits de Guéno, l'éternel,
Et Guéno vainquit la mort.
Conte Fulani (Mali)
L'escargot et la feuille
L'ESCARGOT ET LA FEUILLE
Clodo l'escargot avançait tranquillement, de son pas d'escargot, dans la forêt. C'était un jour de grand vent. il agitait les branches des arbres et certaines frôlaient le sentier. Soudain, Clodo aperçut une petite feuille, toute petite, toute mignonne, qui hurlait :
- Au secours, ce vent est fou ! Au secours, j'ai trop peur !
Aussitôt, Clodo l'escargot tomba amoureux de la petite feuille. Il cria :
- Attends-moi, j'arrive.
Et lentement, de son pas d'escargot, Clodo s'en alla sur l'arbre. Hélas, il était si lent, si lent, que la petite feuille n'en pouvait plus d'attendre. Elle rougit, elle jaunit, elle vieillit. Quand l'escargot arriva sur la branche, la feuille venait de tomber. Sans se décourager, il cria encore une fois :
- Attends-moi, j'arrive !
Et le voici reparti en sens inverse. Longtemps après, il arriva sur le sentier. La feuille morte était encore là. Elle l'avait attendu. Il pleura. Puis tendrement, il lui fit un baiser, un baiser d'escargot.
Le vent eut pitié de ces amants-là. Il souleva la feuille, et l'escargot avec elle. Et le vent, le grand vent, les emporta longtemps, tout là-bas, au pays des amoureux. |
Le vieux sultan
LE VIEUX SULTAN
Un paysan avait un chien fidèle qui s'appelait Sultan. Mais quand le chien fut devenu vieux et qu'il eut perdu toutes ses dents, il ne pouvait plus mordre. Aussi le paysan dit-il un jour à sa femme :
- Demain, je tuerai notre vieux Sultan. Il ne nous sert plus à grand-chose.
Mais la fermière eut pitié de la pauvre bête et répondit :
- Ce chien nous a servis fidèlement pendant de nombreuses années, il a mérité que nous le nourrissions maintenant par charité.
- Non non, pas de sensibleries, reprit le fermier. Plus personne n'a peur de lui, il nous faut un autre chien qui pourra effrayer les voleurs.
Or, la pauvre bête avait entendu la conversation de ses maîtres et fut bien triste en apprenant que son dernier jour était arrivé. Dans son désarroi, elle s'échappa et courut dans le bois se plaindre de son sort à un loup de ses amis.
- N'aie pas peur, lui dit celui-ci, j’ai une idée derrière la tête. Sans doute que le fermier et la fermière iront demain faire les foins et ils emmèneront probablement leur jeune enfant avec eux. Ils déposeront leur bébé près d'une meule. Je sortirai du bois et j'emporterai l'enfant. Tu partiras à ma poursuite et tu le rapporteras aux parents. Ils s'imagineront que tu l'as sauvé de mes crocs et ils te seront tellement reconnaissants qu'ils ne voudront plus se séparer de toi. Tu seras dorloté jusqu'à la fin de tes jours.
Le chien trouva que l'idée était bonne et le lendemain tout se passa comme le loup l'avait imaginé. Le fermier et la fermière poussèrent des cris affreux en voyant le loup emporter leur enfant et ils furent fous de joie quand ils virent que Sultan le leur ramenait.
- Mon bon Sultan, dit le fermier, tu resteras avec nous aussi longtemps que tu vivras. Dorénavant, tu auras ta place près du feu et tu ne devras plus travailler ni monter la garde dehors.
Ce jour-là commença pour Sultan la vie la plus douce qu'on peut imaginer.
Quelques semaines plus tard, il alla remercier le loup, qui fut heureux d'apprendre que son stratagème avait si bien réussi.
- Mais, en revanche, j'espère que tu fermeras les yeux si j'essayais un jour de m'emparer d’une brebis ou d'un agneau.
- Ah pour ça, n'y compte pas, je défendrai fidèlement les intérêts de mon maître.
La nuit suivante, le loup, qui avait faim, parvint à s'introduire dans la bergerie. Sultan l'entendit, réveilla son maître, qui se munit d’une grande fourche et attaqua le loup. Celui-ci s'enfuit en criant à l'adresse de Sultan :
- Tu me paieras ça !
Le lendemain matin, le loup envoya un porc pour provoquer le chien en duel.
A l'heure fixée pour le combat, le vieux Sultan se rendit au bois accompagné de son témoin, qui était un vieux chat boiteux.
Ce chat marchait péniblement et faisait de tels efforts pour avancer que sa queue se dressait toute droite. Le loup s’imagina qu’on accourait sur lui le sabre levé (ce n'était que la queue du chat), et comme la pauvre bête trébuchait en marchant, le loup pensa qu'à chaque pas elle ramassait une pierre pour la lui lancer.
Pris de frayeur, il grimpa dans un arbre tandis que son ami le cochon se dissimulait sous un tas de feuilles mortes. Seules, ses oreilles dépassaient.
Le chien et le chat furent surpris de ne voir personne au lieu de rendez-vous. Ils explorèrent en vain les environs, quand le chat aperçut quelque chose qui bougeait dans les feuilles. Il crut avoir affaire à une souris et mordit de toutes ses forces dans l'oreille du cochon. Celui-ci, pris de peur, essaya de se dégager tout en criant :
- Il est dans l'arbre, le voleur.
Le chien et le chat levant la tête aperçurent alors le loup. Tout honteux, celui-ci descendit de son arbre. Il se réconcilia avec le chien et dorénavant, tous vécurent ensemble en parfaite amitié.
D’après les Frères Grimm, traduit par Pierre Servais |
Le dragon à sept têtes
LE DRAGON À SEPT TÊTES
Cette histoire est arrivée il y a très longtemps, bien avant que Magellan ne découvre l'île Negros. A cette époque, les habitants de cette île vivaient de la pêche et coulaient des jours paisibles au milieu des plantations de canne à sucre.
Mais un matin, un monstrueux dragon vert sombre apparut au sommet de la plus haute montagne. Son corps trapu, long de plusieurs centaines de mètres, était surmonté de sept horribles têtes. De ses naseaux s’échappaient des vapeurs brûlantes. Les sept énormes gueules vomissaient un feu mortel détruisant tout sur son passage. Les habitants terrorisés apprirent que le dragon les laisserait en paix pendant douze mois s'ils lui livraient une jolie jeune fille.
Celle qui fut choisie vivait avec ses parents, dans une maison de palmes tressées, non loin du Lagon Bleu. Les Négritos, c’est ainsi que s'appelaient les habitants de cette île, vinrent la chercher. Vêtue d'un pagne noir, elle partit vers la montagne et personne n'entendit plus jamais parler d'elle. Le dragon l'avait certainement dévorée...
Le calme était revenu sur l'île. Mais lorsque l'année arriva à son terme, il n'y avait plus dans le royaume une seule jolie jeune fille que l'on puisse à nouveau offrir au dragon. Tous les pères avaient défiguré leurs filles.
Seule la fille du roi était encore d'une grande beauté car personne n'avait eu le courage de la défigurer. Alors que de la vapeur et des flammes, chaque jour plus hautes, réapparaissaient au sommet de la montagne, le roi réunit ses sujets :
" Devrons-nous subir à nouveau la colère du dragon ?
- Il n'en est pas question, répliqua d'une voix claire un jeune homme vêtu comme un prince indien. J'ai appris ce qui se passe dans votre royaume et j'ai traversé la mer pour vous venir en aide.
- Je te remercie au nom de mon peuple, répondit le roi. Tue ce dragon. Si tu y parviens, je te couvrirai d'or. "
Ce jeune et bel étranger n'était autre que Laon, I’ami de tous les animaux. Il connaissait parfaitement leur langage et était toujours à leurs côtés lorsqu'ils étaient menacés. En gravissant la montagne, il se pencha vers une fourmi :
" Je suis Laon, ton ami. Va dire à ta reine de marcher avec toutes ses troupes vers le sommet de cette montagne. "
Plus loin, une abeille était occupée à butiner une fleur d'hibiscus :
" Je suis Laon, ton ami. Vole auprès de ta reine. Qu'elle conduise toutes ses abeilles au sommet de cette montagne. J'aurai besoin d’aide pour combattre le dragon. "
Enfin, Laon appela un aigle qui tournoyait dans le ciel :
" Demande à tous tes compagnons de se rassembler au sommet de cette montagne. J'aurai besoin d'aide pour combattre le dragon. "
Venus des quatre coins de l'île, des fourmis, des abeilles et des aigles se dirigeaient maintenant vers le sommet de la montagne. Les fourmis, cohortes noires, jaunes et rouges formées en rangs serrés, avançaient aussi vite que possible. Les abeilles et les aigles filaient dans l'air.
Un aigle l'ayant invité à grimper sur son dos, Laon parvint rapidement au sommet de la montagne. Il aperçut alors le corps immense du dragon, étendu de tout son long sur les rochers. Le monstre fixa Laon de ses terribles yeux verts, il gonfla ses quatorze joues, des flammes jaillirent...
Au même moment, l'immense armée des fourmis se lança à l'assaut du dragon. Elles se glissèrent sous ses écailles et le mordirent avec leurs puissantes mandibules. D'innombrables essaims d'abeilles attaquèrent alors le dragon. Avec leur dard, elles lui piquèrent les yeux jusqu'à ce qu'il devînt aveugle. L’air sentait le soufre... La bête monstrueuse écumait. Elle lacérait le sol de ses griffes. Alors que son immense corps se tordait sur les rochers, des aigles s'abattirent sur lui et lui arrachèrent les yeux. A l'aide de sa grande épée, Laon trancha les sept têtes du dragon et lorsqu'il eut coupé la dernière, celui-ci s'effondra dans un grand fracas et ne bougea plus.
Les habitants de l'île accueillirent Laon avec tous les honneurs. La plus heureuse était la fille du roi qui l’épousa peu de temps après. En souvenir de cette journée mémorable et du courageux jeune homme vêtu comme un prince indien, cette montagne fut appelée Kan Laon. Nom qu'elle porte encore aujourd'hui : le Kan Laon est un volcan !
Conte des Philippines |
Le loup, la chèvre et les sept petits chevreaux
LE LOUP, LA CHÈVRE ET LES SEPT PETITS CHEVREAUX
Il était une fois une chèvre qui avait sept petits chevreaux. Elle devait parfois aller chercher à manger dans le bois ; chaque fois elle disait à ses enfants :
- Attention, je vais dans le bois. Pendant que je serai absente, méfiez-vous du loup, car s'il entre dans notre maison, il vous mangera tous les sept. Parfois il se déguise, mais vous le reconnaîtrez toujours à ses pattes noires et à sa grosse voix.
- Nous ferons bien attention, maman ; nous n'ouvrirons pas au loup, sois tranquille, disaient les chevreaux.
Un jour que la chèvre s'était absentée, après avoir fait ses recommandations habituelles, le loup vint frapper à la porte en
disant :
- Ouvrez, mes petits, c'est votre maman !
Mais les chevreaux reconnurent tout de suite la grosse voix du loup.
- Nous n'ouvrons pas, crièrent-ils. Tu es le loup, nous te reconnaissons bien à ta grosse voix.
Le loup partit furieux et s'en alla au ruisseau boire de l'eau fraîche pour éclaircir sa voix. Puis il revint frapper la porte
- C'est moi, mes enfants, fit-il d'une petite voix douce. C'est moi, votre maman. Ouvrez-moi vite la porte.
Mais les petits chevreaux étaient malins :
- Montre ta patte blanche, si tu es notre maman. Et le loup passa sa grosse patte noire sous la porte. Les chevreaux crièrent tous :
- C'est le loup, c'est le loup ! Notre maman a de jolies pattes blanches. Nous n'ouvrons pas.
De plus en plus furieux, le loup s'en alla trouver son compère le renard. Celui-ci lui donna un bon conseil :
- Enduis ta patte de farine. Elle sera blanche comme celle de la chèvre.
Le loup courut donc au moulin, enfonça une patte dans un sac et revint en marchant sur trois pattes pour ne pas faire tomber la farine, frapper à la porte des chevreaux.
Mais la chèvre était déjà rentrée. Elle se douta bien que c'était le loup qui criait derrière la porte en changeant sa voix
- Ouvrez vite, mes chéris. C'est votre maman. Regardez ma patte blanche.
- Nous ne trouvons plus la clef, répondit-elle en imitant à son tour la voix d'un jeune chevreau. Monte sur le toit et descends par la cheminée.
Sans réfléchir, le loup grimpa sur le toit et s'engagea dans l'étroite cheminée. Il ne put descendre, et, malgré tous ses efforts, il ne parvenait pas davantage à remonter.
Quant à la chèvre, elle ne perdit pas son temps elle alluma un grand feu et le vilain loup fut rôti dans la cheminée.
D’après les Frères Grimm, traduit par Pierre Servais
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Le petit chaperon rouge
LE PETIT CHAPERON ROUGE
Il était une fois une petite fille de village, la plus jolie qu'on eût su voir: sa mère en était folle, et sa mère-grand plus folle encore.
Cette bonne femme lui fit faire un petit chaperon rouge qui lui seyait si bien, que partout on l'appelait le petit Chaperon rouge.
Un jour, sa mère ayant cuit et fait des galettes, lui dit:
- Va voir comment se porte ta mère-grand, car on m'a dit qu'elle était malade. Porte-lui une galette et ce petit pot de beurre.
Le petit Chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre village.
En passant dans un bois, elle rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de la manger; mais il n'osa, à cause de quelques bûcherons qui étaient dans la forêt.
Il lui demanda où elle allait. La pauvre enfant, qui ne savait pas qu'il était dangereux de s'arrêter à écouter un loup, lui dit:
- Je vais voir ma mère-grand, et lui porter une galette, avec un petit pot de beurre, que ma mère lui envoie.
- Demeure-t-elle bien loin? lui dit le Loup.
Oh ! oui, dit le petit Chaperon rouge, c'est par-delà le moulin que vous voyez tout là-bas, à la première maison du village.
Eh bien ! dit le Loup, je veux l'aller voir aussi ; je m'y en vais par ce chemin-ci, et toi par ce chemin-là; et nous verrons à qui plus tôt y sera.
Le Loup se mit à courir de toute sa force par le chemin qui était le plus court, et la petite fille s'en alla par le chemin le plus long, s'amusant à cueillir des noisettes, à courir après des papillons, et à faire des bouquets des petites fleurs qu'elle rencontrait.
Le Loup ne fut pas longtemps à arriver à la maison de la mère-grand; il heurte: toc, toc.
- Qui est là ?
- C'est votre fille, le petit Chaperon rouge, dit le Loup en contrefaisant sa voix, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre, que ma mère vous envoie.
La bonne mère-grand, qui était dans son lit, à cause qu'elle se trouvait un peu mal, lui cria:
- Tire la chevillette, la bobinette cherra.
Le Loup tira la chevillette, et la porte s'ouvrit. Il se jeta sur la bonne femme, et la dévora en moins de rien, car il y avait plus de trois jours qu'il n'avait mangé. Ensuite il ferma la porte, et s'en alla coucher dans le lit de la mère-grand, en attendant le petit Chaperon rouge, qui, quelque temps après, vint heurter à la porte : toc, toc :
- Qui est là ?
Le petit Chaperon rouge, qui entendit la grosse voix du Loup, eut peur d'abord, mais croyant que sa mère-grand était enrhumée, répondit :
- C'est votre fille, le petit Chaperon rouge, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre, que ma mère vous envoie.
Le Loup lui cria en adoucissant un peu sa voix : Tire la chevillette, la bobinette cherra.
Le petit Chaperon rouge tira la chevillette, et la porte s'ouvrit.
Le Loup, la voyant entrer, lui dit en se cachant dans le lit, sous la couverture :
- Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche, et viens te coucher avec moi.
Le petit Chaperon rouge se déshabille, et va se mettre dans le lit, où elle fut bien étonnée de voir comment sa mère-grand était faite en son déshabillé. Elle lui dit :
- Ma mère-grand, que vous avez de grands bras !
- C'est pour mieux t'embrasser, ma fille !
- Ma mère-grand, que vous avez de grandes jambes !
- C est pour mieux courir, mon enfant !
- Ma mère-grand, que vous avez de grandes oreilles !
- C'est pour mieux écouter, mon enfant !
- Ma mère-grand, que vous avez de grands yeux !
- C'est pour mieux te voir, mon enfant !
- Ma mère-grand, que vous avez de grandes dents !
- C'est pour te manger !
Et, en disant ces mots, ce méchant Loup se jeta sur le petit Chaperon rouge, et la mangea.
Charles Perrault |
Le petit poucet
LE PETIT POUCET
Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne qui avaient sept enfants, tous garçons; l'aîné n'avait que dix ans, et le plus jeune n'en avait que sept. Ils étaient fort pauvres, et leurs sept enfants les incommodaient beaucoup, parce qu'aucun d'eux ne pouvait encore gagner sa vie.
Ce qui les chagrinait encore, c'est que le plus jeune était fort délicat et ne disait mot : prenant pour bêtise ce qui était une marque de la bonté de son esprit. Il était fort petit. et, quand il vint au monde, il n'était guère plus gros que le pouce, ce qui fit qu'on l'appela le Petit Poucet.
Ce pauvre enfant était le souffre-douleur de la maison, et on lui donnait toujours le tort.
Cependant il était le plus fin et le plus avisé de tous ses frères, et, s'il parlait peu, il écoutait beaucoup.
Il vint une année très fâcheuse, et la famine fut si grande que ces pauvres gens résolurent de se défaire de leurs enfants.
Un soir que ces enfants étaient couchés, et que le bûcheron était auprès du feu avec sa femme, il lui dit, le coeur serré de douleur :
- Tu vois bien que nous ne pouvons plus nourrir nos enfants; je ne saurais les voir mourir de faim devant mes yeux, et je suis résolu de les mener perdre demain au bois, ce qui sera bien aisé, car, tandis qu'ils s'amuseront à fagoter, nous n'avons qu'à nous enfuir sans qu'ils nous voient.
- Ah ! s'écria la bûcheronne, pourrais-tu toi-même mener perdre tes enfants !
Son mari avait beau lui présenter leur grande pauvreté, elle ne pouvait y consentir; elle était pauvre, mais elle était leur mère.
Cependant, ayant considéré quelle douleur ce lui serait de les voir mourir de faim, elle y consentit, et alla se coucher en pleurant.
Le Petit Poucet ouit tout ce qu'ils dirent, car, ayant entendu, de dedans son lit, qu'ils parlaient d'affaires, il s'était levé doucement et s'était glissé sous l'escabelle de son père, pour les écouter sans être vu.
Il alla se recoucher et ne dormit point du reste de la nuit, songeant à ce qu'il avait à faire.
Il se leva de bon matin, et alla au bord d'un ruisseau, où il emplit ses poches de petits cailloux blancs, et ensuite revint à la maison.
On partit, et le Petit Poucet ne découvrit rien de tout ce qu'il savait à ses frères.
Ils allèrent dans une forêt fort épaisse, où, à dix pas de distance, on ne se voyait pas l'un l'autre.
Le bûcheron se mit à couper du bois. et ses enfants à ramasser des broutilles pour faire des fagots.
Le père et la mère, les voyant occupés a travailler, s'éloignèrent d'eux insensiblement, et puis s'enfuirent tout à coup par un petit sentier détourné.
Lorsque ces enfants se virent seuls, ils se mirent à crier et à pleurer de toute leur force.
Le Petit Poucet les laissait crier, sachant bien par où il reviendrait à la maison, car en marchant il avait laissé tomber le long du chemin les petits cailloux blancs qu'il avait dans ses poches. Il leur dit donc :
- Ne craignez point. mes frères; mon père et ma mère nous ont laissés ici. mais je vous ramènerai bien au logis : suivez-moi seulement.
Ils le suivirent, et il les mena jusqu'à leur maison, par le même chemin qu'ils étaient venus dans la forêt.
Ils n'osèrent d'abord entrer, mais ils se mirent tous contre la porte, pour écouter ce que disaient leur père et leur mère.
Dans le moment que le bûcheron et la bûcheronne arrivèrent chez eux, le seigneur du village leur envoya dix écus, qu'il leur devait il y avait longtemps, et dont ils n'espéraient plus rien.
Cela leur redonna la vie, car les pauvres gens mouraient de faim. Le bûcheron envoya sur l'heure sa femme à la boucherie. Comme il y avait longtemps qu'elle n'avait mangé, elle acheta trois fois plus de viande qu'il n'en fallait pour le souper de deux personnes.
Lorsqu'ils furent rassasiés, la bûcheronne dit :
- Hélas ! où sont maintenant nos pauvres enfants ! Ils feraient bonne chère de ce qui nous reste là. Mais aussi Guillaume, c'est toi qui les as voulu perdre : j'avais bien dit que nous nous en repentirions. Que font-ils maintenant dans cette forêt ? Hélas ! mon Dieu, les loups les ont peut-être déjà mangés ! Tu es bien inhumain d'avoir perdu ainsi tes enfants !
Le bûcheron s'impatienta à la fin; car elle redit plus de vingt fois qu'ils s'en repentiraient, et qu'elle l'avait bien dit.
Il la menaça de la battre si elle ne se taisait.
Ce n'est pas que le bûcheron ne fût peut-être encore plus fâché que sa femme, mais c'est qu'elle lui rompait la tête, et qu'il était de l'humeur de beaucoup d'autres gens, qui aiment fort les femmes qui disent bien, mais qui trouvent très importunes celles qui ont toujours bien dit.
La bûcheronne était tout en pleurs :
- Hélas ! où sont maintenant mes enfants, mes pauvres enfants ! Elle le dit une fois si haut, que les enfants. qui étaient à la porte, l'ayant entendue, se mirent à crier tous ensemble :
- Nous voilà ! nous voilà !
Elle courut vite leur ouvrir la porte, et leur dit en les embrassant :
- Que je suis aise de vous revoir. mes chers enfants ! Vous êtes bien las, et vous avez bien faim; et toi, Pierrot, comme te voilà crotté, viens que je te débarbouille.
Ce Pierrot était son fils aîné, qu'elle aimait plus que tous les autres, parce qu'il était un peu rousseau, et qu'elle était un peu rousse.
Ils se mirent à table, et mangèrent d'un appétit qui faisait plaisir au père et à la mère, à qui ils racontaient la peur qu'ils avaient eue dans la forêt, en parlant presque toujours tous ensemble.
Ces bonnes gens étaient ravis de revoir leurs enfants avec eux, et cette joie dura tant que les dix écus durèrent.
Mais, lorsque l'argent fut dépensé, ils retombèrent dans leur premier chagrin, et résolurent de les perdre encore; et, pour ne pas manquer leur coup, de les mener bien plus loin que la première fois.
Ils ne purent parler de cela si secrètement qu'ils ne fussent entendus par le Petit Poucet, qui fit son compte de sortir d'affaire comme il avait déjà fait; mais, quoiqu'il se fût levé de grand matin pour aller ramasser des petits cailloux. il ne put en venir à bout, car il trouva la porte de la maison fermée à double tour.
Il ne savait que faire. Lorsque la bûcheronne leur ayant donné à chacun un morceau de pain pour leur déjeuner, il songea qu'il pourrait se servir de son pain au lieu de cailloux. en le jetant par miettes le long des chemins où ils passeraient : il le serra donc dans sa poche.
Le père et la mère les menèrent dans l'endroit de la forêt le plus épais et le plus obscur; et, dès qu'ils y furent, ils gagnèrent un faux-fuyant, et les laissèrent là.
Le Petit Poucet ne s'en chagrina pas beaucoup, parce qu'il croyait retrouver aisément son chemin. par le moyen de son pain qu'il avait semé partout ou il avait passé; mais il fut bien surpris lorsqu'il ne put en retrouver une seule miette : les oiseaux étaient venus qui avaient tout mangé.
Les voilà donc bien affligés; car, plus ils marchaient, plus ils s'égaraient et s'enfonçaient dans la forêt.
La nuit vint, et il s'éleva un grand vent qui leur faisait des peurs épouvantables.
Ils croyaient n'entendre de tous côtés que les hurlements de loups qui venaient à eux pour les manger. Ils n'osaient presque se parler, ni tourner la tête.
Il survint une grosse pluie, qui les perça jusqu'aux os; ils glissaient à chaque pas, et tombaient dans la boue, d'où ils se relevaient tout crottés, ne sachant que faire de leurs mains.
Le Petit Poucet grimpa au haut d'un arbre, pour voir s'il ne découvrirait rien; ayant tourné la tête de tous côtés, il vit une petite lueur comme d'une chandelle, mais qui était bien loin, par-delà la forêt.
Il descendit de l'arbre, et, lorsqu'il fut a terre, il ne vit plus rien : cela le désola.
Cependant, ayant marché quelque temps, avec ses frères, du côté qu'il avait vu la lumière. il la revit en sortant du bois.
Ils arrivèrent enfin à la maison où était cette chandelle, non sans bien des frayeurs : car souvent ils la perdaient de vue; ce qui leur arrivait toutes les fois qu'ils descendaient dans quelque fond.
Ils heurtèrent à la porte, et une bonne femme vint leur ouvrir.
Elle leur demanda ce qu'ils voulaient.
Le Petit Poucet lui dit qu'ils étaient de pauvres enfants qui s'étaient perdus dans la forêt, et qui demandaient à coucher par charité.
Cette femme, les voyant tous si jolis. se mit a pleurer, et leur dit :
- Hélas ! mes pauvres enfants, où êtes-vous venus ? Savez-vous que c'est ici la maison d'un Ogre qui mange les petits enfants ?
- Hélas ! madame, lui répondit le Petit Poucet qui tremblait de toute sa force, aussi bien que ses frères, que ferons-nous ? Il est bien sûr que les loups de la forêt ne manqueront pas de nous manger cette nuit si vous ne voulez pas nous retirer chez vous, et, cela étant, nous aimons mieux que ce soit Monsieur qui nous mange; peut-être qu'il aura pitié de nous si vous vouliez bien l'en prier.
La femme de l'Ogre, qui crut qu'elle pourrait les cacher à son mari jusqu'au lendemain matin, les laissa entrer, et les mena se chauffer auprès d'un bon feu; car il y avait un mouton tout entier à la broche, pour le souper de l'Ogre.
Comme ils commençaient à se chauffer, ils entendirent heurter trois ou quatre grands coups à la porte : c'était l'Ogre qui revenait.
Aussitôt sa femme les fit cacher sous le lit, et alla ouvrir la porte.
L'Ogre demanda d'abord si le souper était prêt, et si on avait tiré du vin, et aussitôt se mit à table.
Le mouton était encore tout sanglant, mais il ne lui en sembla que meilleur. Il flairait à droite et à gauche, disant qu'il sentait la chair fraîche.
- Il faut, lui dit sa femme. que ce soit ce veau que je viens d'habiller, que vous sentez.
- Je sens la chair fraîche, te dis-je encore une fois, reprit l'Ogre, en regardant sa femme de travers, et il y a ici quelque chose que je n'entends pas.
En disant ces mots, il se leva de table, et alla droit au lit.
- Ah ! dit-il, voilà donc comme tu veux me tromper, maudite femme ! Je ne sais à quoi il tient que je ne te mange aussi : bien t'en prend d'être une vieille bête. Voilà du gibier qui me vient bien à propos pour traiter trois ogres de mes amis, qui doivent me venir voir ces jours-ci.
Il les tira de dessous le lit, l'un après l'autre.
Ces pauvres enfants se mirent à genoux, en lui demandant pardon; mais ils avaient affaire au plus cruel de tous les ogres, qui, bien loin d'avoir de la pitié, les dévorait déjà des yeux, et disait à sa femme que ce seraient là de friands morceaux, lorsqu'elle leur aurait fait une bonne sauce.
Il alla prendre un grand couteau; et en approchant de ces pauvres enfants, il l'aiguisait sur une longue pierre, qu'il tenait à sa main gauche. Il en avait déjà empoigné un, lorsque sa femme lui dit :
- Que voulez-vous faire à l'heure qu'il est ? n'aurez-vous pas assez de temps demain.
- Tais-toi, repris l'Ogre, ils en seront plus mortifiés.
- Mais vous avez encore là tant de viande, reprit sa femme : voilà un veau, deux moutons et la moitié d'un cochon !
- Tu as raison, dit l'Ogre : donne-leur bien à souper, afin qu'ils ne maigrissent pas. et va les mener coucher.
La bonne femme fut ravie de joie, et leur porta bien à souper; mais ils ne purent manger, tant ils étaient saisis de peur.
Pour l'Ogre, il se remit a boire, ravi d'avoir de quoi si bien régaler ses amis. Il but une douzaine de coups de plus qu'à l'ordinaire : ce qui lui donna un peu dans la tête, et l'obligea de s'aller coucher.
L'Ogre avait sept filles, qui n'étaient encore que des enfants.
Ces petites ogresses avaient toutes le teint fort beau, parce qu'elles mangeaient de la chair fraîche, comme leur père; mais elles avaient de petits yeux gris et tout ronds, le nez crochu, et une fort grande bouche, avec de longues dents fort aiguës et fort éloignées l'une de l'autre.
Elles n'étaient pas encore fort méchantes; mais elles promettaient beaucoup, car elles mordaient déjà les petits enfants pour en sucer le sang.
On les avait fait coucher de bonne heure, et elles étaient toutes sept dans un grand lit, ayant chacune une couronne d'or sur la tête. Il y avait dans la même chambre un autre lit de la même grandeur : ce fut dans ce lit que la femme de l'Ogre mit coucher les sept petits garçons; après quoi, elle s'alla coucher auprès de son mari.
Le Petit Poucet, qui avait remarqué que les filles de l'Ogre avaient des couronnes d'or sur la tête, et qui craignait qu'il ne prît à l'Ogre quelques remords de ne les avoir pas égorgés dès le soir même, se leva vers le milieu de la nuit, et prenant les bonnets de ses frères et le sien, il alla tout doucement les mettre sur la tête des sept filles de l'Ogre, après leur avoir ôté leurs couronnes d'or, qu'il mît sur la tête de ses frères et sur la sienne afin que l'Ogre les prît pour ses filles, et ses filles pour les garçons qu'il voulait égorger.
La chose réussit comme il l'avait pensé; car l'Ogre s'étant éveillé sur le minuit, eut regret d'avoir différé au lendemain ce qu'il pouvait exécuter la veille.
Il se jeta donc brusquement hors du lit, et, prenant son grand couteau :
- Allons voir, dit-il, comment se portent nos petits drôles; n'en faisons pas à deux fois.
Il monta donc à tâtons à la chambre de ses filles, et s'approcha du lit où étaient les petits garçons. qui dormaient tous, excepté le Petit Poucet, qui eut bien peur lorsqu'il sentit la main de l'Ogre qui lui tâtaient la tête, comme il avait tâté celles de tous ses frères.
L'Ogre, qui sentit les couronnes d'or :
- Vraiment, dit-il, j'allais faire là un bel ouvrage; je vois bien que je bus trop hier au soir.
Il alla ensuite au lit de ses filles, où, ayant senti les petits bonnets des garçons :
- Ah ! les voilà, dit-il. nos gaillards; travaillons hardiment. En disant ces mots, il coupa. sans balancer, la gorge à ses sept filles.
Fort content de cette expédition. il alla se recoucher auprès de sa femme.
Aussitôt que le Petit Poucet entendit ronfler l'Ogre, il réveilla ses frères, et leur dit de s'habiller promptement et de le suivre.
Ils descendirent doucement dans le jardin et sautèrent par-dessus les murailles. Ils coururent presque toute la nuit, toujours en tremblant, et sans savoir où ils allaient.
L'Ogre, s'étant éveillé, dit à sa femme :
- Va-t'en là-haut habiller ces petits drôles d'hier au soir.
L'Ogresse fut fort étonnée de la bonté de son mari. ne se doutant point de la manière qu'il entendait qu'elle les habillât, et croyant qu'il lui ordonnait de les aller vêtir. Elle monta en haut, où elle fut bien surprise, lorsqu'elle aperçut ses sept filles égorgées et nageant dans leur sang.
Elle commença par s'évanouir. L'Ogre, craignant que sa femme ne fût trop longtemps à faire la besogne dont il l'avait chargée, monta en haut pour lui aider. Il ne fut pas moins étonné que sa femme lorsqu'il vit cet affreux spectacle.
- Ah ! qu'ai-je fait là ? s'écria-t-il. Ils me le payeront, les malheureux, et tout à l'heure.
Il jeta aussitôt une potée d'eau dans le nez de sa femme; et, l'ayant fait revenir :
- Donne-moi vite mes bottes de sept lieues, lui dit-il, afin que j'aille les attraper.
Il se mit en campagne, et, après avoir couru bien loin de tous les côtés, enfin il entra dans le chemin où marchaient ces pauvres enfants, qui n'étaient plus qu'à cent pas du logis de leur père.
Ils virent l'Ogre qui allait de montagne en montagne, et qui traversait des rivières aussi aisément qu'il aurait fait le moindre ruisseau.
Le Petit Poucet, qui vit un rocher creux proche le lieu où ils étaient, y fit cacher ses six frères et s'y fourra aussi, regardant toujours ce que l'Ogre deviendrait.
L'Ogre, qui se trouvait fort las du long chemin qu'il avait fait inutilement (car les bottes de sept lieues fatiguent fort leur homme), voulut se reposer; et, par hasard, il alla s'asseoir sur la roche où les petits garçons s'étaient cachés.
Comme il n'en pouvait plus de fatigue, il s'endormit après s'être reposé quelque temps, et vint à ronfler si effroyablement, que les pauvres enfants n'eurent pas moins de peur que quand il tenait son grand couteau pour leur couper la gorge.
Le Petit Poucet en eut moins de peur, et dit à ses frères de s'enfuir promptement à la maison pendant que l'Ogre dormait bien fort, et qu'ils ne se missent point en peine de lui. Ils crurent son conseil, et gagnèrent vite la maison.
Le Petit Poucet, s'étant approché de l'Ogre, lui tira doucement ses bottes, et les mit aussitôt.
Les bottes étaient fort grandes et fort larges; mais, comme elles étaient fées, elles avaient le don de s'agrandir et de s'apetisser selon la jambe de celui qui les chaussait; de sorte qu'elles se trouvèrent aussi justes à ses pieds et à ses jambes que si elles eussent été faites pour lui.
Il alla droit à la maison de l'Ogre, où il trouva sa femme qui pleurait auprès de ses filles égorgées.
- Votre mari, lui dit le Petit Poucet, est en grand danger : car il a été pris par une troupe de voleurs, qui ont juré de le tuer s'il ne leur donne tout son or et tout son argent. Dans le moment qu'ils lui tenaient le poignard sur la gorge, il m'a aperçu et m'a prié de vous venir avertir de l'état où il est, et de vous dire de me donner tout ce qu'il a de vaillant, sans en rien retenir, parce qu'autrement ils le tueront sans miséricorde. Comme la chose presse beaucoup il a voulu que je prisse ses bottes de sept lieues que voilà, pour faire diligence, et aussi afin que vous ne croyiez pas que je sois un affronteur.
La bonne femme, fort effrayée, lui donna aussitôt tout ce qu'elle avait; car cet Ogre ne laissait pas d'être fort bon mari, quoiqu'il mangeât les petits enfants.
Le Petit Poucet, étant donc chargé de toutes les richesses de l'Ogre, s'en revint au logis de son père, où il fut reçu avec bien de la joie.
Il y a bien des gens qui ne demeurent pas d'accord de cette dernière circonstance. et qui prétendent que le Petit Poucet n'a jamais fait ce vol a l'Ogre; qu'à la vérité il n'avait pas fait conscience de lui prendre ses bottes de sept lieues, parce qu'il ne s'en servait que pour courir après les petits enfants.
Ces gens-là assurent le savoir de bonne part, et même pour avoir bu et mangé dans la maison du bûcheron. Ils assurent que lorsque le Petit Poucet eut chaussé les bottes de l'Ogre, il s'en alla à la cour, où il savait qu'on était fort en peine d'une armée qui était à deux cent lieues de là, et du succès d'une bataille qu'on avait donnée.
Il alla, disent-ils, trouver le roi et lui dit que, s'il le souhaitait, il lui rapporterait des nouvelles de l'armée avant la fin du jour.
Le roi lui promit une grosse somme d'argent s'il en venait à bout.
Le Petit Poucet rapporta des nouvelles, dès le soir même; et, cette première course l'ayant fait connaître, il gagnait tout ce qu'il voulait; car le roi le payait parfaitement bien pour porter ses ordres à l'armée.
Après avoir fait pendant quelque temps le métier de courrier, et y avoir amassé beaucoup de bien, il revint chez son père, où il n'est pas possible d'imaginer la joie qu'on eut de le revoir.
Il mit toute la famille à son aise. Il acheta des offices de nouvelle création pour son père et pour ses frères; et par là il les établit tous, et fit parfaitement bien sa cour en même temps.
Charles Perrault
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La belle au bois dormant
LA BELLE AU BOIS DORMANT
Il était une fois un roi et une reine qui étaient si fâchés de n'avoir point d'enfants, si fâchés qu'on ne saurait dire. Ils allèrent à toutes les eaux du monde : voeux, pèlerinages, menues dévotions, tout fut mis en oeuvre, et rien n'y faisait. Enfin, pourtant, la reine eut une fille. On fit un beau baptême; on donna pour marraines à la petite princesse toutes les fées qu'on pût trouver dans le pays (il s'en trouva sept). afin que, chacune d'elles lui faisant un don, comme c'était la coutume des fées en ce temps-là, la princesse eût, par ce moyen, toutes les perfections imaginables.
Après les cérémonies du baptême, toute la compagnie revint au palais du roi, où il y avait un grand festin pour les fées.
On mit devant chacune d'elles un couvert magnifique, avec un étui d'or massif où il y avait une cuiller, une fourchette et un couteau de fin or, garnis de diamants et de rubis.
Mais, comme chacun prenait place à table, on vit entrer une vieille fée, qu'on n'avait point priée, parce qu'il y avait plus de cinquante ans qu'elle n'était pas sortie d'une tour, et qu'on la croyait morte ou enchantée.
Le roi lui fit donner un couvert; mais il n'y eut pas moyen de lui donner un étui d'or massif, comme aux autres, parce que l'on n'en avait fait faire que sept, pour les sept fées.
La vieille crut qu'on la méprisait, et grommela quelques menaces entre ses dents. Une des jeunes fées, qui se trouva auprès d'elle, l'entendit et, jugeant qu'elle pourrait donner quelques fâcheux dons à la petite princesse, alla, dès qu'on fut sorti de table, se cacher derrière la tapisserie, afin de parler la dernière, et de pouvoir réparer, autant qu'il lui serait possible, le mal que la vieille aurait fait.
Cependant les fées commencèrent à faire leurs dons à la princesse.
La plus jeune lui donna pour don qu'elle serait la plus belle personne du monde : celle d'après, qu'elle aurait de l'esprit comme un ange; la troisième, qu'elle aurait une grâce admirable à tout ce qu'elle ferait; la quatrième, qu'elle danserait parfaitement bien; la cinquième, qu'elle chanterait comme un rossignol; et la sixième. qu'elle jouerait de toutes sortes d'instruments dans la dernière perfection.
Le rang de la vieille fée étant venu, elle dit, en branlant la tête encore plus de dépit que de vieillesse, que la princesse se percerait la main d'un fuseau, et qu'elle en mourrait.
Ce terrible don fit frémir toute la compagnie, et il n'y eut personne qui ne pleurât. Dans ce moment, la jeune fée sortit de derrière la tapisserie, et dit tout haut ces paroles :
- Rassurez-vous, roi et reine, votre fille n'en mourra point; il est vrai que je n'ai pas assez de puissance pour défaire entièrement ce que mon ancienne a fait; la princesse se percera la main d'un fuseau; mais, au lieu d'en mourir, elle tombera seulement dans un profond sommeil, qui durera cent ans, au bout desquels le fils d'un roi viendra la réveiller.
Le roi, pour tâcher d'éviter le malheur annoncé par la vieille, fit publier aussitôt un édit par lequel il défendait à toutes personnes de filer au fuseau, ni d'avoir des fuseaux chez soi, sur peine de vie.
Au bout de quinze ou seize ans, le roi et la reine étant allés à une de leurs maisons de plaisance il arriva que la jeune princesse, courant un jour dans le château, et montant de chambre en chambre, alla jusqu'au haut d'un donjon, dans un petit galetas où une bonne vieille était seule à filer sa quenouille.
Cette bonne femme n'avait point ouï parler des défenses que le roi avait faites de filer au fuseau.
- Que faites-vous là, ma bonne femme ? dit la princesse.
- Je file, ma belle enfant, lui répondit la vieille, qui ne la connaissait pas.
- Ah ! que cela est joli ! reprit la princesse; comment faites-vous ? donnez-moi que je vois si j'en ferais bien autant.
Elle n'eut pas plus tôt pris le fuseau, que comme elle était fort vive, un peu étourdie, et que d'ailleurs l'arrêt des fées l'ordonnait ainsi, elle s'en perça la main et tomba évanouie.
La bonne vieille, bien embarrassée, crie au secours.
On vient de tous côtés; on jette de l'eau au visage de la princesse, on la délace, on lui frappe dans les mains, on lui frotte les tempes avec de l'eau de la reine de Hongrie; mais rien ne la faisait revenir.
Alors le roi, qui était monté au bruit, se souvint de la prédiction des fées, et, jugeant bien qu'il fallait que cela arrivât, puisque les fées l'avaient dit, fit mettre la princesse dans un bel appartement du palais, sur un lit en broderie d'or et d'argent.
On eût dit d'un ange, tant elle était belle; car son évanouissement n'avait point ôté les couleurs vives de son teint :
Ses joues étaient incarnates, et ses lèvres comme du corail.
Elle avait seulement les yeux fermés, mais on l'entendait respirer doucement : ce qui faisait voir qu'elle n'était pas morte.
Le roi ordonna qu'on la laissât dormir en repos, jusqu'à ce que son heure de se réveiller fût venue.
La bonne fée qui lui avait sauvé la vie en la condamnant à dormir cent ans, était dans le royaume de Mataquin, à douze mille lieues de là, lorsque l'accident arriva à la princesse; mais elle en fut avertie, en un instant, par un petit nain qui avait des bottes de sept lieues (c'était des bottes avec lesquelles on faisait sept lieues d'une seule enjambée).
La fée partit aussitôt, et on la vit, au bout d'une heure, arriver dans un chariot tout de feu, traîné par des dragons.
Le roi alla lui présenter la main à la descente du chariot.
Elle approuva tout ce qu'il avait fait; mais, comme elle était grandement prévoyante, elle pensa que, quand la princesse viendrait à se réveiller, elle serait bien embarrassée toute seule dans ce vieux château.
Voici ce qu'elle fit :
Elle toucha de sa baguette tout ce qui était dans ce château (hors le roi et la reine) : les gouvernantes, filles d'honneur, femmes de chambre, gentilshommes officiers, maîtres d'hôtel, cuisiniers, marmitons, galopins, gardes, suisses, pages, valets de pied.
Elle toucha aussi tous les chevaux qui étaient dans les écuries, avec les palefreniers, les gros mâtins de la basse-cour, et la petite Pouffe, petite chienne de la princesse, qui était auprès d'elle sur son lit.
Dès qu'elle les eût touchés, ils s'endormirent tous, pour ne se réveiller qu'en même temps que leur maîtresse, afin d'être tout prêts à la servir quand elle en aurait besoin.
Les broches mêmes qui étaient au feu, toutes pleines de perdrix et de faisans, s'endormirent, et le feu aussi. Tout cela se fit en un moment : les fées n'étaient pas longues à leur besogne.
Alors le roi et la reine, après avoir baisé leur chère enfant sans qu'elle s'éveillât, sortirent du château, et firent publier des défenses à qui que ce soit d'en approcher.
Ces défenses n'étaient pas nécessaires; car il crût dans un quart d'heure, tout autour du parc, une si grande quantité de grands arbres et de petits, de ronces et d'épines entrelacées les unes dans les autres, que bête ni homme n'y aurait pu passer; en sorte qu'on ne voyait plus que le haut des tours du château, encore n'était-ce que de bien loin.
On ne douta point que la fée n'eût encore fait là un tour de son métier, afin que la princesse, pendant qu'elle dormirait, n'eût rien a craindre des curieux.
Au bout de cent ans, le fils du roi qui régnait alors, et qui était d'une autre famille que la princesse endormie, étant allé à la chasse de ce côté-là, demanda ce que c'était que des tours qu'il voyait au-dessus d'un grand bois fort épais.
Chacun lui répondit selon qu'il en avait ouï parler : les uns disaient que c'était un vieux château où il revenait des esprits; les autres, que tous les sorciers de la contrée y faisaient leur sabbat.
La plus commune opinion était qu'un ogre y demeurait, et que là il emportait tous les enfants qu'il pouvait attraper, pour les pouvoir manger à son aise, et sans qu'on le pût suivre, ayant seul le pouvoir de se faire un passage au travers du bois.
Le prince ne savait qu'en croire, lorsqu'un vieux paysan prit la parole et lui dit :
- Mon prince, il y a plus de cinquante ans que j'ai ouï dire à mon père qu'il y avait dans ce château une princesse, la plus belle du monde, qu'elle y devait dormir cent ans, et qu'elle serait réveillée par le fils d'un roi, à qui elle était réservée.
Le jeune prince, à ce discours, se sentit tout de feu; il crut, sans balancer, qu'il mettrait fin à une si belle aventure, et, poussé par l'amour et par la gloire, il résolut de voir sur-le-champ ce qui en était.
A peine s'avança-t-il vers le bois, que tous ces grands arbres, ces ronces et ces épines s'écartèrent d'elles-mêmes pour le laisser passer.
Il marche vers le château qu'il voyait au bout d'une grande avenue où il entra, et, ce qui le surprit un peu, il vit que personne de ses gens ne l'avait pu suivre, parce que les arbres s'étaient rapprochés dès qu'il avait été passé.
Il ne laissa pas de continuer son chemin : un prince jeune et amoureux est toujours vaillant.
Il entra dans une grande avant-cour, où tout ce qu'il vît d'abord était capable de le glacer de crainte.
C'était un silence affreux : l'image de la mort s'y présentait partout, et ce n'étaient que des corps étendus d'hommes et d'animaux qui paraissaient morts.
Il reconnut pourtant bien, au nez bourgeonné et à la face vermeille des suisses, qu'ils n'étaient qu'endormis; et leurs tasses, où il y avait encore quelques gouttes de vin, montraient assez qu'ils s'étaient endormis en buvant.
Il passe une grande cour pavée de marbre; il monte l'escalier; il entre dans la salle des gardes, qui étaient rangés en haie, la carabine sur l'épaule, et ronflant de leur mieux.
Il traverse plusieurs chambres, pleines de gentilshommes et de dames, dormant tous, les uns debout, les autres assis.
Il entre dans une chambre toute dorée, et il voit sur un lit, dont les rideaux étaient ouverts de tous côtes. le plus beau spectacle qu'il eût jamais vu : une princesse qui paraissait avoir quinze ou seize ans, et dont l'éclat resplendissant avait quelque chose de lumineux et de divin.
Il s'approcha en tremblant et en admirant, et se mit à genoux auprès d'elle.
Alors, comme la fin de l'enchantement était venue, la princesse s'éveilla, et, le regardant avec des yeux plus tendres qu'une première vue semblait le permettre :
- Est-ce vous mon prince ? lui dit-elle; vous vous êtes bien fait attendre.
Le prince, charmé de ces paroles, et plus encore de la manière dont elles étaient dites, ne savait comment lui témoigner sa joie et sa reconnaissance : il l'assura qu'il l'aimait plus que lui-même.
Ses discours furent mal rangés; ils en plurent davantage : peu d'éloquence, beaucoup d'amour.
Il était plus embarrassé qu'elle, et l'on ne doit pas s'en étonner : elle avait eu le temps de songer à ce qu'elle aurait à lui dire; car il y a apparence (l'histoire n'en dit pourtant rien) que la bonne fée, pendant un si long sommeil, lui avait procuré le plaisir des songes agréables.
Enfin, il y avait quatre heures qu'ils se parlaient, et ils ne s'étaient pas encore dit la moitié des choses qu'ils avaient à se dire.
Cependant tout le palais s'était réveillé avec la princesse : chacun songeait à faire sa charge; et, comme ils n'étaient pas tous amoureux, ils mouraient de faim.
La dame d'honneur, pressée comme les autres, s'impatienta, et dit tout haut à la princesse que la viande était servie.
Le prince aida la princesse à se lever : elle était tout habillée, et fort magnifiquement; mais il se garda bien de lui dire qu'elle était habillée comme sa mère-grand, et qu'elle avait un collet monté; elle n'en était pas moins belle.
Ils passèrent dans un salon de miroirs, et y soupèrent, servis par les officiers de la princesse.
Les violons et les hautbois jouèrent de vieilles pièces, mais excellentes, quoiqu'il y eût près de cent ans qu'on ne les jouât plus ; et, après souper, sans perdre de temps, le grand aumônier les maria dans la chapelle du château, et la dame d'honneur leur tira le rideau.
Ils dormirent peu : la princesse n'en avait pas grand besoin, et le prince la quitta, dès le matin, pour retourner à la ville, où son père devait être en peine de lui.
Le prince lui dit qu'en chassant il s'était perdu dans la forêt, et qu'il avait couché dans la hutte d'un charbonnier, qui lui avait fait manger du pain noir et du fromage.
Le roi, son père, qui était bonhomme le crut; mais sa mère n'en fut pas bien persuadée, et voyant qu'il allait presque tous les jours à la chasse, et qu'il avait toujours une raison en main pour s'excuser quand il avait couché deux ou trois nuits dehors, elle ne douta plus qu'il n'eût quelque amourette; car il vécut avec la princesse plus de deux ans entiers, et en eut deux enfants, dont le premier, qui fut une fille, fut nommée Aurore, et le second, un fils, qu'on nomma Jour : parce qu'il paraissait encore plus beau que sa soeur.
La reine dit plusieurs fois à son fils, pour le faire expliquer, qu'il fallait se contenter dans la vie; mais il n'osa jamais se fier à elle de son secret : il la craignait, quoiqu'il l'aimât, car elle était de race ogresse, et le roi ne l'avait épousée qu'à cause de ses grands biens. On disait même tout bas à la cour qu'elle avait les inclinations des ogres, et qu'en voyant passer de petits enfants, elle avait toutes les peines du monde à se retenir de se jeter sur eux : ainsi le prince ne lui voulut jamais rien dire.
Mais quand le roi fut mort, ce qui arriva au bout de deux ans, et qu'il se vît le maître, il déclara publiquement son mariage, et alla en grande cérémonie quérir la reine sa femme dans son château.
On lui fit une entrée magnifique dans la ville capitale, où elle entra au milieu de ses deux enfants.
Quelque temps après, le roi alla faire la guerre à l'empereur Cantalabutte, son voisin.
Il laissa la régence du royaume à la reine sa mère, et lui recommanda fort sa femme et ses enfants : il devait être à la guerre tout l'été; et, dès qu'il fût parti, la reine mère envoya sa bru et ses enfants à une maison de campagne dans les bois, pour pouvoir plus aisément assouvir son horrible envie.
Elle y alla quelques jours après, et dit un soir à son maître d'hôtel :
- Je veux manger demain à mon dîner la petite Aurore.
- Ah ! madame, dit le maître d'hôtel...
- Je le veux, dit la reine (et elle le dit d'un ton d'ogresse qui a envie de manger de la chair fraîche), et je la veux manger à la sauce Robert.
Ce pauvre homme, voyant bien qu'il ne fallait pas se jouer à une ogresse, prit son grand couteau, et monta à la chambre de la petite Aurore : elle avait pour lors quatre ans, et vint en sautant et en riant se jeter à son col, et lui demander du bonbon. Il se mit à pleurer : le couteau lui tomba des mains, et il alla dans la basse-cour couper la gorge à un petit agneau, et lui fit une si bonne sauce que sa maîtresse l'assura qu'elle n'avait rien mangé de si bon.
Il avait emporté en même temps la petite Aurore, et l'avait donnée à sa femme, pour la cacher dans le logement qu'elle avait au fond de la basse-cour.
Huit jours après, la méchante reine dit a son maître d'hôtel :
- Je veux manger à mon souper le petit Jour.
Il ne répliqua pas, résolu de la tromper comme l'autre fois. Il alla chercher le petit Jour, et le trouva avec un petit fleuret à la main, dont il faisait des armes avec un gros singe : il n'avait pourtant que trois ans.
Il le porta à sa femme, qui le cacha avec la petite Aurore, et donna, à la place du petit Jour, un petit chevreau fort tendre, que l'ogresse trouva admirablement bon.
Cela était fort bien allé jusque-là : mais un soir, cette méchante reine dit au maître d'hôtel :
- Je veux manger la reine à la même sauce que ses enfants.
Ce fut alors que le pauvre maître d'hôtel désespéra de la pouvoir encore tromper.
La jeune reine avait vingt ans passés, sans compter les cent ans qu'elle avait dormi : sa peau était un peu dure, quoique belle et blanche; et le moyen de trouver dans la ménagerie une bête aussi dure que cela ?
Il prit la résolution pour sauver sa vie, de couper la gorge à la reine, et monta dans sa chambre dans l'intention de n'en pas faire à deux fois. Il s'excitait à la fureur, et entra, le poignard à la main, dans la chambre de la jeune reine; il ne voulut pourtant point la surprendre, et il lui dit, avec beaucoup de respect, l'ordre qu'il avait reçu de la reine mère.
- Faites votre devoir, lui dit-elle en lui tendant le col; exécutez l'ordre qu'on vous a donné; j'irai revoir mes enfants, mes pauvres enfants, que j'ai tant aimés ! car elle les croyait morts, depuis qu'on les avait enlevés sans lui rien dire.
- Non, non, madame, lui répondit le pauvre maître d'hôtel, tout attendri, vous ne mourrez point et vous ne laisserez pas d'aller revoir vos chers enfants; mais ce sera chez moi, où je les ai cachés, et je tromperai encore la reine, en lui faisant manger une biche en votre place.
Il la mena aussitôt à sa chambre, où la laissant embrasser ses enfants et pleurer avec eux, il alla accommoder une biche, que la reine mangea à son souper, avec le même appétit que si c'eût été la reine : elle était bien contente de sa cruauté, et elle se préparait à dire au roi, a son retour, que les loups enragés avaient mangé la reine sa femme et ses deux enfants.
Un soir qu'elle rôdait, à son ordinaire, dans les cours et basses-cours du château, pour y halener quelque viande fraîche, elle entendit, dans une salle basse, le petit Jour, qui pleurait, parce que la reine sa mère le voulait faire fouetter, à cause qu'il avait été méchant; et elle entendit aussi la petite Aurore, qui demandait pardon pour son frère !
L'ogresse reconnut la voix de la reine et de ses enfants, et, furieuse d'avoir été trompée, elle commanda, dès le lendemain matin, avec une voix épouvantable qui faisait trembler tout le monde, qu'on apportât au milieu de la cour une grande cuve, qu'elle fit remplir de crapauds, de vipères, de couleuvres et de serpents, pour y faire jeter la reine et ses enfants, le maître d'hôtel, sa femme et sa servante : elle avait donné ordre de les amener les mains liées derrière le dos.
Ils étaient là, et les bourreaux se préparaient à les jeter dans la cuve, lorsque le roi, qu'on n'attendait pas si tôt, entra dans la cour à cheval, il était venu en poste, et demanda, tout étonné, ce que voulait dire cet horrible spectacle.
Personne n'osait l'en instruire, quand l'ogresse enragée de voir ce qu'elle voyait, se jeta elle-même la tête la première dans la cuve, et fut dévorée en un instant par les vilaines bêtes qu'elle y avait fait mettre. Le roi ne laissa pas d'en être fâché : elle était sa mère ; mais il s'en consola bientôt avec sa belle femme et ses enfants.
Charles Perrault |
Les fées
LES FÉES
Il était une fois une veuve qui avait deux filles l'aînée lui ressemblait si fort d'humeur et de visage que, qui la voyait, voyait la mère.
Elles étaient toutes deux si désagréables et si orgueilleuses, qu'on ne pouvait vivre avec elles.
La cadette, qui était le vrai portrait de son père pour la douceur et l'honnêteté, était avec cela une des plus belles filles qu'on eût su voir.
Comme on aime naturellement son semblable, cette mère était folle de sa fille aînée et, en même temps avait une aversion effroyable pour la cadette.
Elle la faisait manger à la cuisine et travailler sans cesse.
Il fallait, entre autres choses, que cette pauvre enfant allât, deux fois le jour, puiser de l'eau à une grande demi lieue du logis, et qu'elle en rapportât plein une grande cruche.
Un jour qu'elle était à cette fontaine, il vint à elle une pauvre femme qui la pria de lui donner à boire.
- Oui-da, ma bonne mère, dit cette belle fille, et rinçant aussitôt sa cruche, elle puisa de l'eau au plus bel endroit de la fontaine et la lui présenta soutenant toujours la cruche, afin qu'elle bût plus aisément.
La bonne femme. ayant bu, lui dit :
- Vous êtes si belle, si bonne et si honnête, que je ne puis m'empêcher de vous faire un don ; car c'était une fée qui avait pris la forme d'une pauvre femme de village, pour voir jusqu'où irait l'honnêteté de cette jeune fille. Je vous donne pour don, poursuivit la fée, qu'a chaque parole que vous direz, il vous sortira de la bouche ou une fleur, ou une pierre précieuse.
Lorsque cette belle fille arriva au logis, sa mère la gronda de revenir si tard de la fontaine.
- Je vous demande pardon, ma mère, dit cette pauvre fille, d'avoir tarde si longtemps ; et, en disant ces mots, il lui sortit de la bouche deux roses, deux perles et deux gros diamants.
- Que vois-je là ! dit sa mère tout étonnée ; je crois qu'il lui sort de la bouche des perles et des diamants. D'où vient cela, ma fille ? (Ce fut là la première fois qu'elle l'appela sa fille.)
La pauvre enfant lui raconta naïvement tout ce qui était arrivé, non sans jeter une infinité de diamants.
- Vraiment, dit la mère. Il faut que j'y envoie ma fille. Tenez, Fanchon, voyez ce qui sort de la bouche de votre soeur quand elle parle; ne seriez-vous pas bien aise d'avoir le même don ? Vous n'avez qu'à aller puiser de l'eau à la fontaine et, quand une pauvre femme vous demandera à boire, lui en donner bien honnêtement.
- Il me ferait beau voir, répondit la brutale, aller à la fontaine.
- Je veux que vous y alliez, reprit la mère, et tout à l'heure.
Elle y alla, mais toujours en grondant. Elle prit le plus beau flacon d'argent qui fût dans le logis.
Elle ne fut pas plus tôt arrivée à la fontaine, qu'elle vit sortir du bois une dame magnifiquement vêtue, qui vint lui demander à boire. C'était la même fée qui avait apparu à sa soeur, mais qui avait pris l'air et les habits d'une princesse, pour voir jusqu'où irait la malhonnêteté de cette fille.
- Est-ce que je suis ici venue, lui dit cette brutale orgueilleuse, pour vous donner à boire ! Justement j'ai apporté un flacon d'argent tout exprès pour donner à boire à Madame ? J'en suis d'avis : buvez à même si vous voulez.
- Vous n'êtes guère honnête, reprit la fée, sans se mettre en colère. Eh bien ! puisque vous êtes si peu obligeante, je vous donne pour don qu'à chaque parole que vous direz, il vous sortira de la bouche ou un serpent, ou un crapaud.
D'abord que sa mère l'aperçut, elle lui cria :
- Eh bien ! ma fille !
- Eh bien ! ma mère ! lui répondit la brutale, en jetant deux vipères et deux crapauds.
O ciel, s'écria la mère, que vois-je là ? C'est sa soeur qui en est cause : elle me le paiera ; et aussitôt elle courut pour la battre. La pauvre enfant s'enfuit et alla se sauver dans la forêt prochaine.
Le fils du roi, qui revenait de la chasse, la rencontra et, la voyant si belle, lui demanda ce qu'elle faisait là toute seule et ce qu'elle avait à pleurer !
- Hélas ! Monsieur, c'est ma mère qui m'a chassée du logis. Le fils du roi, qui vit sortir de sa bouche cinq ou six perles et autant de diamants, la pria de lui dire d'où cela lui venait. Elle lui conta toute son aventure.
Le fils du roi en devint amoureux ; et, considérant qu'un tel don valait mieux que tout ce qu'on pouvait donner en mariage à une autre, l'emmena au palais du roi son père, ou il l'épousa.
Pour sa soeur, elle se fit tant haïr, que sa propre mère la chassa de chez elle ; et la malheureuse, après avoir bien couru sans trouver personne qui voulût la recevoir, alla mourir au coin d'un bois.
Charles Perrault
Cendrillon ou la petite pantoufle de vair
CENDRILLON OU LA PETITE PANTOUFLE DE VAIR
Il était une fois un gentilhomme qui épousa, en secondes noces, une femme, la plus hautaine et la plus fière qu'on eût jamais vue.
Elle avait deux filles de son humeur, et qui lui ressemblaient en toutes choses. Le mari avait, de son côté, une jeune fille, mais d'une douceur et d'une bonté sans exemple : elle tenait cela de sa mère, qui était la meilleure personne du monde.
Les noces ne furent pas plus tôt faites que la belle-mère fit éclater sa mauvaise humeur : elle ne put souffrir les bonnes qualités de cette jeune enfant, qui rendaient ses filles encore plus haïssables.
Elle la chargea des plus viles occupations de la maison : c'était elle qui nettoyait la vaisselle et les montées, qui frottait la chambre de madame et celles de mesdemoiselles ses filles; elle couchait tout au haut de la maison, dans un grenier, sur une méchante paillasse, pendant que ses soeurs étaient dans des chambres parquetées, où elles avaient des lits des plus à la mode, et des miroirs où elles se voyaient depuis les pieds jusqu'à la tête.
La pauvre fille souffrait tout avec patience et n'osait s'en plaindre a son père, qui l'aurait grondée, parce que sa femme le gouvernait entièrement.
Lorsqu'elle avait fait son ouvrage, elle s'allait mettre au coin de la cheminée, et s'asseoir dans les cendres. La cadette, l'appelait Cendrillon. Cependant Cendrillon, avec ses méchants habits, ne laissait pas d'être cent fois plus belle que ses soeurs, quoique vêtues très magnifiquement.
Il arriva que le fils du roi donna un bal et qu'il en pria toutes les personnes de qualité.
Nos deux demoiselles en furent aussi priées, car elles faisaient grande figure dans le pays.
Les voilà bien aises et bien occupées à choisir les habits et les coiffures qui leur siéraient le mieux.
Nouvelle peine pour Cendrillon, car c'était elle qui repassait le linge de ses soeurs et qui godronnai leurs manchettes. On ne parlait que de la manière dont on s'habillerait.
Moi, dit l'aînée, je mettrai mon habit de velours rouge et ma garniture d'Angleterre.
Moi, dit la cadette, je n'aurai que ma jupe ordinaire; mais, en récompense, je mettrai mon manteau à fleurs d'or et ma barrière de diamants, qui n'est pas des plus indifférentes.
On envoya quérir la bonne coiffeuse pour dresser les cornettes à deux rangs, et on fit acheter des mouches de la bonne faiseuse.
Elles appelèrent Cendrillon pour lui demander son avis, car elle avait le goût bon. Cendrillon les conseilla le mieux du monde, et s'offrit même à les coiffer; ce qu'elles voulurent bien.
En les coiffant, elles lui disaient :
- Cendrillon, serais-tu bien aise d'aller au bal ?
- Hélas ! mesdemoiselles, vous vous moquez de moi : ce n'est pas là ce qu'il me faut.
- Tu as raison, on rirait bien, si on voyait Cendrillon aller au bal.
Une autre Cendrillon les aurait coiffées de travers; mais elle était bonne, et elle les coiffa parfaitement bien.
Elles furent près de deux jours sans manger, tant elles étaient transportées de joie.
On rompit plus de douze lacets, à force de les serrer pour leur rendre leur taille plus menue, et elles étaient toujours devant le miroir.
Enfin l'heureux jour arriva; on partit, et Cendrillon les suivit des yeux le plus longtemps qu'elle put.
Lorsqu'elle ne les vit plus, elle se mit à pleurer.
Sa marraine, qui la vit tout en pleurs, lui demanda ce qu'elle avait.
- Je voudrais bien... je voudrais bien...
Elle pleurait si fort qu'elle ne put achever.
Sa marraine, qui était fée, lui dit :
- Tu voudrais bien aller au bal, n'est-ce pas ?
- Hélas ! oui, dit Cendrillon en soupirant.
- Eh bien ! seras-tu bonne fille ? dit sa marraine, je t'y ferai aller.
Elle la mena dans sa chambre, et lui dit :
- Va dans le jardin, et apporte-moi une citrouille.
Cendrillon alla aussitôt cueillir la plus belle qu'elle pût trouver, et la porta à sa marraine, ne pouvant deviner comment cette citrouille la pourrait faire aller au bal.
Sa marraine la creusa et, n'ayant laissé que l'écorce. La frappa de sa baguette, et la citrouille fut aussitôt changée en un beau carrosse tout doré.
Ensuite elle alla regarder dans la souricière, où elle trouva six souris toutes en vie. Elle dit à Cendrillon de lever un peu la trappe de la souricière, et, à chaque souris qui sortait. elle lui donnait un coup de sa baguette, et la souris était aussitôt changée en un beau cheval : ce qui fit un bel attelage de six chevaux, d'un beau gris de souris pommelé.
Comme elle était en peine de quoi elle ferait un cocher :
- Je vais voir, dit Cendrillon, s'il n'y a pas quelque rat dans la ratière, nous en ferons un cocher.
- Tu as raison, dit sa marraine, va voir.
Cendrillon lui apporta la ratière ou il y avait trois gros rats.
La fée en prit un d'entre les trois, à cause de sa maîtresse barbe, et, l'ayant touché, il fut changé en un gros cocher, qui avait une des plus belles moustaches qu'on ait jamais vues.
Ensuite elle lui dit :
- Va dans le jardin, tu y trouveras six lézards derrière l'arrosoir; apporte-les moi.
Elle ne les eut pas plutôt apportés, que sa marraine les changea en six laquais, qui montèrent aussitôt derrière le carrosse, avec leurs habits chamarrés, et qui s'y tenaient attachés comme s'ils n'eussent fait autre chose de toute leur vie.
La fée dit alors à Cendrillon :
- Eh bien ! voilà de quoi aller au bal : n'es-tu pas bien aise ?
- Oui, mais est-ce que j'irai comme cela, avec mes vilains habits ?
Sa marraine ne fit que la toucher avec sa baguette, et en même temps ses habits furent changés en des habits d'or et d'argent, tout chamarrés de pierreries; elle lui donna ensuite une paire de pantoufles de vair, les plus jolies du monde.
Quand elle fut ainsi parée, elle monta en carrosse; mais sa marraine lui recommanda, sur toutes choses, de ne pas passer minuit, l'avertissant que, si elle demeurait au bal un moment davantage, son carrosse redeviendrait citrouille, ses chevaux des souris ses laquais des lézards, et que ses beaux habits reprendraient leur première forme.
Elle promit à sa marraine qu'elle ne manquerait pas de sortir du bal avant minuit.
Elle part, ne se sentant pas de joie.
Le fils du roi qu'on alla avertir qu'il venait d'arriver une grande princesse qu'on ne connaissait point, courut la recevoir. Il lui donna la main à la descente du carrosse, et la mena dans la salle où était la compagnie.
Il se fit alors un grand silence; on cessa de danser et les violons ne jouèrent plus, tant on était attentif à contempler les grandes beautés de cette inconnue. On n'entendait qu'un bruit confus : Ah ! qu'elle est belle !
Le roi même, tout vieux qu'il était, ne laissait pas de la regarder, et de dire tout bas à la reine qu'il y avait longtemps qu'il n'avait vu une si belle et si aimable personne.
Toutes les dames étaient attentives à considérer sa coiffure et ses habits, pour en avoir, dès le lendemain de semblables, pourvu qu'il se trouvât des étoffes assez belles et des ouvriers assez habiles.
Le fils du roi la mit à la place la plus honorable, et ensuite la prit pour la mener danser.
Elle dansa avec tant de grâce, qu'on l'admira encore davantage.
On apporta une fort belle collation, dont le jeune prince ne mangea point, tant il était occupé à la considérer.
Elle alla s'asseoir auprès de ses soeurs et leur fit mille honnêtetés; elle leur fit part des oranges et des citrons que le prince lui avait donnés, ce qui les étonna fort, car elles ne la connaissaient point.
Lorsqu'elles causaient ainsi, Cendrillon entendit sonner onze heures trois quarts; elle fit aussitôt une grande révérence à la compagnie, et s'en alla le plus vite qu'elle pût.
Dès qu'elle fut arrivée, elle alla trouver sa marraine, et après l'avoir remerciée, elle lui dit qu'elle souhaiterait bien aller encore le lendemain au bal, parce que le fils du roi l'en avait priée.
Comme elle était occupée à raconter à sa marraine tout ce qui s'était passé au bal, les deux soeurs heurtèrent à la porte; Cendrillon leur alla ouvrir.
- Que vous êtes longtemps à revenir ! leur dit-elle en bâillant, en se frottant les yeux, et en s'étendant comme si elle n'eût fait que de se réveiller, elle n'avait cependant pas eu envie de dormir, depuis qu'elles s'étaient quittées.
- Si tu étais venue au bal, lui dit une de ses soeurs, tu ne t'y serais pas ennuyée; il est venu la plus belle princesse, la plus belle qu'on puisse jamais voir; elle nous a fait mille civilités; elle nous a donné des oranges et des citrons.
Cendrillon ne se sentait pas de joie : elle leur demanda le nom de cette princesse; mais elles lui répondirent qu'on ne la connaissait pas, que le fils du roi en était fort en peine, et qu'il donnerait toutes choses au monde pour savoir qui elle était.
Cendrillon sourit et leur dit :
- Elle était donc bien belle ? Mon Dieu ! que vous êtes heureuses ! ne pourrais-je point la voir ? Hélas ! mademoiselle Javotte, prêtez-moi votre habit jaune que vous mettez tous les jours.
- Vraiment, dit mademoiselle Javotte, je suis de cet avis ! Prêter mon habit à une vilaine Cendrillon comme cela ! Il faudrait que je fusse bien folle.
Cendrillon s'attendait bien à ce refus, et elle en fut bien aise, car elle aurait été grandement embarrassée. si sa soeur eût bien voulu lui prêter son habit.
Le lendemain, les deux soeurs furent au bal, et Cendrillon aussi, mais encore plus parée que la première fois.
Le fils du roi fut toujours auprès d'elle, et ne cessa de lui conter des douceurs. La jeune demoiselle ne s'ennuyait point et oublia ce que sa marraine lui avait recommandé; de sorte qu'elle entendît sonner le premier coup de minuit, lorsqu'elle ne croyait point qu'il fût encore onze heures : elle se leva et s'enfuit aussi légèrement qu'aurait fait une biche.
Le prince la suivit. mais il ne put l'attraper Elle laissa tomber une de ses pantoufles de vair, que le prince ramassa bien soigneusement.
Cendrillon arriva chez elle, bien essoufflée, sans carrosse, sans laquais, et avec ses méchants habits; rien ne lui était resté de sa magnificence, qu'une de ses petites pantoufles. La pareille de celle qu'elle avait laissé tomber.
On demanda aux gardes de la porte du palais s'ils n'avaient point vu sortir une princesse : ils dirent qu'ils n'avaient vu sortir personne qu'une jeune fille fort mal vêtue, et qui avait plus l'air d'une paysanne que d'une demoiselle.
Quand les deux soeurs revinrent du bal, Cendrillon leur demanda si elles s'étaient encore bien diverties, et si la belle dame y avait été; elles lui dirent que oui, mais qu'elle s'était enfuie, lorsque minuit avait sonné, et si promptement qu'elle avait laissé tomber une de ses petites pantoufles de vair, la plus jolie du monde; que le fils du roi l'avait ramassée, et qu'il n'avait fait que la regarder pendant tout le reste du bal, et qu'assurément il était fort amoureux de la belle personne à qui appartenait la petite pantoufle.
Elles dirent vrai; car, peu de jours après, le fils du roi fit publier, à son de trompe, qu'il épouserait celle dont le pied serait bien juste à la pantoufle.
On commença à l'essayer aux princesses, ensuite aux duchesses et à toute la cour, mais inutilement. On l'apporta chez les deux soeurs qui firent tout leur possible pour faire entrer leur pied dans la pantoufle, mais elles ne purent en venir à bout. Cendrillon, qui les regardait, et qui reconnut sa pantoufle, dit en riant :
- Que je voie si elle ne me serait pas bonne !
Ses soeurs se mirent à rire et à se moquer d'elle.
Le gentilhomme qui faisait l'essai de la pantoufle, ayant regardé attentivement Cendrillon, et la trouvant fort belle, dit que cela était très juste. et qu'il avait ordre de l'essayer à toutes les filles. Il fit asseoir Cendrillon, et, approchant la pantoufle de son petit pied, il vit qu'il y entrait sans peine, et qu'elle y était juste comme de cire.
L'étonnement des deux soeurs fut grand, mais plus grand encore quand Cendrillon tira de sa poche l'autre petite pantoufle qu'elle mît à son pied.
Là-dessus arriva la marraine, qui ayant donné un coup de baguette sur les habits de Cendrillon, les fit devenir encore plus magnifiques que tous les autres.
Alors ses deux soeurs la reconnurent pour la belle personne qu'elles avaient vue au bal. Elles se jetèrent à ses pieds pour lui demander pardon de tous les mauvais traitements qu'elles lui avaient fait souffrir. Cendrillon les releva et leur dit, en les embrassant, qu'elle leur pardonnait de bon coeur, et qu'elle les priait de l'aimer bien toujours.
On la mena chez le jeune prince, parée comme elle était. Il la trouva encore plus belle que jamais; et, peu de jours après, il l'épousa.
Cendrillon, qui était aussi bonne que belle. fit loger ses deux soeurs au palais, et les maria, dès le jour même, à deux grands seigneurs de la cour.
Charles Perrault
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Barbe bleue
LA BARBE BLEUE
Il était une fois un homme qui avait de belles maisons à la ville et à la campagne, de la vaisselle d'or et d'argent, des meubles en broderies, et des carrosses tout dorés.
Mais, par malheur, cet homme avait la barbe bleue : cela le rendait si laid et si terrible, qu'il n'était ni femme ni fille qui ne s'enfuit de devant lui.
Une de ses voisines, dame de qualité, avait deux filles parfaitement belles. Il lui en demanda une en mariage, et lui laissa le choix de celle qu'elle voudrait lui donner. Elles n'en voulaient point toutes deux, et se le renvoyaient l'une à l'autre, ne pouvant se résoudre à prendre un homme qui eût la barbe bleue.
Ce qui les dégoûtait encore, c'est qu'il avait déjà épousé plusieurs femmes, et qu'on ne savait ce que ces femmes étaient devenues.
La Barbe Bleue, pour faire connaissance, les mena, avec leur mère et trois ou quatre de leurs meilleures amies et quelques jeunes gens du voisinage, à une de ses maisons de campagne, ou on demeura huit jours entiers.
Ce n'étaient que promenades, que parties de chasse et de pêche, que danses et festins, que collations : on ne dormait point et on passait toute la nuit à se faire des malices les uns aux autres ; enfin tout alla si bien que la cadette commença à trouver que le maître du logis n'avait plus la barbe si bleue, et que c'était un fort honnête homme. Dès qu'on fut de retour à la ville, le mariage se conclut.
Au bout d'un mois, la Barbe Bleue dit à sa femme qu'il était obligé de faire un voyage en province, de six semaines au moins, pour une affaire de conséquence ; qu'il la priait de se bien divertir pendant son absence ; qu'elle fit venir ses bonnes amies ; qu'elle les menât à la campagne, si elle voulait ; que partout elle fit bonne chère.
- Voilà, dit-il, les clefs des deux grands garde-meubles ; voilà celles de la vaisselle d'or et d'argent, qui ne sert pas tous les jours ; voilà celles de mes coffres-forts où est mon or et mon argent ; celles des cassettes où sont mes pierreries, et voilà le passe-partout de tous les appartements. Pour cette petite clef-ci, c'est la clef du cabinet au bout de la grande galerie de l'appartement bas : ouvrez tout, allez partout ; mais, pour ce petit cabinet, je vous défends d'y entrer, et je vous le défends de telle sorte que, s'il vous arrive de l'ouvrir, il n'y a rien que vous ne deviez attendre de ma colère.
Elle promit d'observer exactement tout ce qui lui venait d'être ordonné, et lui, après l'avoir embrassée, il monte dans son carrosse, et part pour son voyage.
Les voisines et les bonnes amies n'attendirent pas qu'on les envoyât quérir pour aller chez la jeune mariée, tant elles avaient d'impatience de voir toutes les richesses de sa maison, n'ayant osé y venir pendant que le mari y était, à cause de sa barbe bleue, qui leur faisait peur. Les voilà aussitôt à parcourir les chambres, les cabinets, les garde-robes, toutes plus belles et plus riches les unes que les autres.
Elles montèrent ensuite aux garde-meubles, où elles ne pouvaient assez admirer le nombre et la beauté des tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des guéridons, des tables et des miroirs où l'on se voyait depuis les pieds jusqu'à la tête, et dont les bordures, les unes de glace, les autres d'argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu'on eût jamais vues. Elles ne cessaient d'exagérer et d'envier le bonheur de leur amie, qui, cependant, ne se divertissait point a voir toutes ces richesses a cause de l'impatience qu'elle avait d'aller ouvrir le cabinet de l'appartement bas.
Elle fut si pressée de sa curiosité, que, sans considérer qu'il était malhonnête de quitter sa compagnie, elle y descendit par un petit escalier dérobé, et avec tant de précipitation qu'elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois.
Etant arrivée à la porte du cabinet, elle s'y arrêta quelque temps, songeant à la défense que son mari lui avait faite, et considérant qu'il pourrait lui arriver malheur d'avoir été désobéissante ; mais la tentation est si forte qu'elle ne pût la surmonter : elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet.
D'abord elle ne vit rien, parce que les fenêtres étaient fermées. Après quelques moments, elle commença à voir que le plancher était tout couvert de sang caillé, et que, dans ce sang, se miraient les corps de plusieurs femmes mortes et attachées le long des murs : c'était toutes les femmes que la Barbe Bleue avait épousées, et qu'il avait égorgées l'une après l'autre. Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet, qu'elle venait de retirer de la serrure, lui tomba de la main.
Après avoir un peu repris ses sens, elle ramassa la clef, referma la porte, et monta à sa chambre pour se remettre un peu ; mais elle n'en pouvait venir à bout, tant elle était émue.
Ayant remarqué que la clef du cabinet était tachée de sang, elle l'essuya deux ou trois fois ; mais le sang ne s'en allait point : elle eut beau la laver, et même la frotter avec du sablon et avec du grès, il demeura toujours du sang, car la clef était fée, et il n'y avait pas moyen de la nettoyer tout à fait : quand on ôtait le sang d'un côté, il revenait de l'autre.
La Barbe Bleue revint de son voyage dès le soir même, et dit qu'il avait reçu des lettres, dans le chemin, qui lui avaient appris que l'affaire pour laquelle il était parti venait d'être terminée à son avantage.
Sa femme fit tout ce qu'elle pût pour lui témoigner qu'elle était ravie de son prompt retour.
Le lendemain, il lui redemanda les clefs ; et elle les lui donna, mais d'une main si tremblante, qu'il devina sans peine tout ce qui s'était passé.
- D'où vient, lui dit-il, que la clef du cabinet n'est point avec les autres ?
- Il faut, dit-elle, que je l'aie laissée là-haut sur ma table.
- Ne manquez pas, dit la Barbe Bleue, de me la donner tantôt.
Apres plusieurs remises, il fallut apporter la clef. La Barbe Bleue, l'ayant considérée, dit à sa femme :
- Pourquoi y a-t-il du sang sur cette clef ?
- Je n'en sais rien, répondit la pauvre femme, plus pâle que la mort.
- Vous n'en savez rien ! reprit la Barbe Bleue ; je le sais bien, moi. Vous avez voulu entrer dans le cabinet ! Eh bien, madame, vous y entrerez et irez prendre votre place auprès des dames que vous y avez vues.
Elle se jeta aux pieds de son mari en pleurant et en lui demandant pardon, avec toutes les marques d'un vrai repentir, de n'avoir pas été obéissante. Elle aurait attendri un rocher, belle et affligée comme elle était ; mais la Barbe Bleue avait le coeur plus dur qu'un rocher.
- Il faut mourir, madame, dit-il, et tout à l'heure.
- Puisqu'il faut mourir, répondit-elle en le regardant les yeux baignés de larmes, donnez-moi un peu de temps pour prier Dieu.
- Je vous donne un demi-quart d'heure, reprit la Barbe Bleue ; mais pas un moment davantage.
Lorsqu'elle fut seule, elle appela sa soeur, et lui dit :
- Ma soeur Anne, car elle s'appelait ainsi, monte, je te prie, sur le haut de la tour pour voir si mes frères ne viennent point : ils m'ont promis qu'ils me viendraient voir aujourd'hui ; et, si tu les vois, fais-leur signe de se hâter.
La soeur Anne monta sur le haut de la tour ; et la pauvre affligée lui criait de temps en temps :
- Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?
Et la soeur Anne lui répondait :
- Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie.
Cependant, la Barbe Bleue, tenant un grand coutelas à sa main, criait de toute sa force à sa femme :
- Descends vite, ou je monterai là-haut.
- Encore un moment, s'il vous plaît, lui répondait sa femme ; et aussitôt elle criait tout bas :
- Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?
Et la soeur Anne répondait :
- Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie.
- Descends donc vite, criait la Barbe Bleue, ou je monterai là-haut.
- Je m'en vais, répondait la femme ; et puis elle criait :
- Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?
- Je vois, répondit la soeur Anne, une grosse poussière qui vient de ce côté-ci...
- Sont-ce mes frères ?
- Hélas ! non ma soeur : c'est un troupeau de moutons...
- Ne veux-tu pas descendre ? criait la Barbe Bleue
- Encore un moment, répondait sa femme ; et plus elle criait :
- Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ?
- Je vois, répondit-elle, deux cavaliers qui viennent de ce côté-ci, mais ils sont bien loin encore.
- Dieu soit loué ! s'écria-t-elle un moment après, ce sont mes frères. Je leur fais signe tant que je puis de se hâter.
La Barbe Bleue se mit à crier si fort que toute la maison en trembla. La pauvre femme descendit, et alla se jeter à ses pieds tout épleurée et tout échevelée.
- Cela ne sert de rien, dit la Barbe Bleue ; il faut mourir.
Puis, la prenant d'une main par les cheveux, et de l'autre levant le coutelas en l'air, il allait lui abattre la tête. La pauvre femme, se tournant vers lui, et le regardant avec des yeux mourants, le pria de lui donner un petit moment pour se recueillir.
- Non, non, dit-il, recommande-toi bien a Dieu ; et, levant son bras... Dans ce moment, on heurta si fort à la porte que la Barbe Bleue s'arrêta tout court On ouvrit, et aussitôt on vit entrer deux cavaliers, qui, mettant l'épée à la main, coururent droit à la Barbe Bleue
Il reconnut que c'étaient les frères de sa femme, l'un dragon et l'autre mousquetaire, de sorte qu'il s'enfuît aussitôt pour se sauver ; mais les deux frères le poursuivirent de si près qu'ils l'attrapèrent avant qu'il pût gagner le perron. Ils lui passèrent leur épée au travers du corps, et le laissèrent mort.
La pauvre femme était presque aussi morte que son mari, et n'avait pas la force de se lever pour embrasser ses frères.
Il se trouva que la Barbe Bleue n'avait point d'héritiers, et qu'ainsi sa femme demeura maîtresse de tous ses biens. Elle en employa une partie à marier sa soeur Anne avec un jeune gentilhomme dont elle était aimée depuis longtemps ; une autre partie à acheter des charges de capitaine à ses deux frères, et le reste à se marier elle-même à un fort honnête homme, qui lui fit oublier le mauvais temps qu'elle avait passé avec la Barbe Bleue.
Charles Perrault |
La petite fille aux allumettes
LA PETITE FILLE AUX ALLUMETTES
Qu'il faisait froid Il neigeait, et la nuit tombait. C'était le dernier soir de l'année. Une petite fille marchait dans la rue, nu-pieds et tête nue. C’était une petite marchande d'allumettes. Ce jour-là, personne ne lui en avait acheté, personne ne lui avait donné le moindre sou.
Elle avait faim, elle avait froid. Les flocons de neige tombaient sur ses cheveux dorés. Des lumières brillaient derrière les fenêtres. Une odeur d'oie rôtie se répandait dans les rues. La fillette se blottit entre deux maisons. Elle n'osait pas rentrer chez elle, les mains vides, car son père la battrait. Ses mains étaient gelées. Si elle osait tirer une allumette du paquet, la frotter contre le mur, elle pourrait se réchauffer les doigts.
La petite fille saisit une allumette, et le feu jaillit. Elle entoura de ses mains la flamme chaude et claire. Elle ferma les yeux et s’imagina assise devant un grand poêle de fer. Le feu déjà la réchauffait, quand la flamme s'éteignit. Le poêle disparut et la fillette resta seule dans la nuit, un bout d'allumette brûlée à la main.
Elle frotta une seconde allumette. La lueur éclaira le mur qui devint transparent comme un voile. À l'intérieur de la salle, la table était mise. Sur la nappe blanche, couverte de porcelaine, une oie rôtie fumait. L'oie sauta du plat, marcha sur le parquet avec une fourchette et un couteau plantés dans son dos, et elle s'approcha de la petite marchande. Alors, la flamme s'éteignit et la petite fille ne vit plus que l'épais mur gris.
Elle alluma une autre allumette... et se trouva assise sous un superbe arbre de Noël. Des milliers de lumières brûlaient sur les branches vertes. Elle étendit les mains, mais la flamme s'éteignit de nouveau. Les lumières de Noël montèrent vers le ciel où elles se transformèrent en étoiles scintillantes. Une d'elles fila et traça une longue ligne lumineuse au-dessus de la ville.
L’enfant frotta encore une allumette et sa vieille grand-mère apparut, sa grand-mère qu'elle aimait tant et qui était morte à présent.
- Grand-mère, emmène-moi avec toi, supplia la petite marchande. Je sais que tu disparaîtras quand la lumière s'éteindra.
La fillette frotta toutes les allumettes qui restaient dans le paquet pour retenir sa grand-mère. La vieille dame prit alors sa petite-fille dans ses bras, et toutes deux s'envolèrent joyeusement vers le ciel, la ou il n'y a ni peur, ni froid, ni faim.
Au matin, la petite fille était assise entre les deux maisons. Elle avait les joues roses, le sourire aux lèvres, mais elle était sans vie.
A côté d'elle, on découvrit les allumettes brûlées et l'on pensa " Elle a voulu se réchauffer avant de mourir gelée. " Personne ne sut qu'elle avait vu de merveilleuses images et qu’elle s'était envolée dans les bras de sa chère grand-mère. |
Les trois portes
LES TROIS PORTES
Par une claire soirée de printemps, Tanguy le petit cordonnier rencontra une fée jeune et jolie. Celle-ci lui sourit et lui dit de se trouver avant minuit devant le grand menhir gris. Avant de disparaître, elle lui confia trois mystérieuses une clé en or, une clé en argent, une clé en cuivre...
Au douzième coup de minuit, le grand menhir gris tourna sur lui-même... Tanguy vit alors apparaître les premières marches d'un escalier noir et profond. Le garçon tremblait de peur mais il descendit tout de même, une torche à la main. Tout en bas de l'escalier, il trouva trois portes en chêne. Chacune des trois clefs ouvrait une porte.
Derrière la première porte, Tanguy découvrit un mouton blanc, couché sur des milliers de pièces d'or.
Derrière la deuxième porte, il découvrit un mouton gris, couché sur des milliers de pièces d'argent.
Et derrière la troisième porte, il découvrit un mouton noir, couché sur un tas de pièces de cuivre.
Le mouton noir salua aimablement Tanguy et lui dit :
" Ami, tu peux emporter tout ce que tu désires mais tu dois absolument respecter trois conditions : faire un seul voyage hors d'ici, emporter une seule sorte de pièces, …et surtout agir avant le chant du coq !"
"Facile !" pensa Tanguy, en se dirigeant vers le mouton blanc.
Tanguy commençait à remplir ses poches de pièces d'or quand, d'une voix grave, le mouton blanc lui conseilla :
"Ami, tu devrais aller chercher un sac chez toi. Ainsi tu pourrais transporter beaucoup plus d'or en une seule fois..."
Tanguy trouva l'idée astucieuse et courut aussitôt chez lui. Il courut à en perdre haleine, afin d'être revenu avant le chant du coq.
À son retour, le coq dormait toujours. Il faisait encore nuit noire. Pourtant le menhir gris s'était refermé sur l'entrée du souterrain !
Pourquoi ?
En courant chercher un sac, Tanguy avait déjà effectué un voyage...
À vouloir trop emporter de pièces, il en avait beaucoup perdu... |
L'oiseau qui portait le printemps
L'OISEAU QUI PORTAIT LE PRINTEMPS
En regardant les nuages, Céline vit un oiseau très fatigué qui s'abattit ans son jardin plein de neige. La petite fille sortit tout de suite de sa maison, prit l'oiseau et l'emmena vite auprès du feu pour le réchauffer. L'oiseau était très joli, mais il n'en pouvait plus. Alors Céline lui donna des graines, de l'eau et lui fit un perchoir. Vers le soir, l'oiseau allait mieux, mangeait volontiers les graines et, la nuit venue, il s'installa sur le perchoir.
Le lendemain matin, Céline poussa un cri de surprise émerveillée : dans son jardin il n'y avait plus de neige, les arbres portaient des bourgeons et les pâquerettes s'ouvraient sur la pelouse verte.
- C'est le printemps, s'écria la petite fille. Il est en avance !
Elle sortit dans le jardin et vit l'oiseau qui la suivait en volant : il était tout ragaillardi et chantait à tue-tête.
- Tu es guéri. Je suis bien contente.
- Je n'étais pas malade, répondit l'oiseau, mais j'étais chargé car je portais le printemps.
Céline battit des mains toute joyeuse. Elle alla chercher son chien Pouf et, avec l'oiseau, ils se rendirent tous les trois dans la campagne, où le printemps s'épanouissait : les oiseaux chantaient, les papillons volaient, les écureuils faisaient des rondes dans les prés.
Quand il eut bien vu tout ce qui l'intéressait, l'oiseau dit au revoir à Céline.
- Tu t'en vas déjà ? demanda la petite fille.
- Je vais porter le printemps dans les autres pays, répondit l'oiseau. Mais, je reviendrai te voir dès que j'aurai terminé ma tâche. A bientôt et merci.
Il s'envola très haut. Pouf aboya pour lui dire adieu, Céline lui fit de grands signes à l'aide de son petit mouchoir blanc, puis elle cueillit un gros bouquet de boutons d'or et le ramena à, la maison. |
Neige en fleurs
NEIGE EN FLEURS
Il y avait une fois un petit bois très aimé, parce que l'on y trouvait toujours quelque fleur jolie, un oiseau jaseur, une mousse nouvelle, enfin de ces riens qui vous font le cœur gai pour la journée. Voilà qu'un aigre matin de mars, une vieille femme apparut, un panier au bras. Ma foi, il n'y avait pas grand chose à cueillir, à peine trois brins de cresson sauvage. La pauvre hochait la tête d'un air désolé, si bien que le vent enflant la ramure d'un bouleau donna voix à celui-ci:
- Que cherches-tu, grand-mère ?
- Hélas, cher bouleau, ma petite fille qui est bien malade voudrait un plat de neige. Je n'ose la contrarier, alors je viens voir s'il n'en resterait pas dans quelque creux.
- Tu serais venue la semaine passée, nous aurions pu te satisfaire, mais vois, le soleil a tout fondu, le ruisseau a tout bu.
Le ruisseau regrettait sa soif et sanglotait en sourdine.
- Dis-moi, reprit le bouleau avec bonté, ta petite n'aime-t-elle pas les fleurs ?
- Oh, si ; seulement c'est de la neige qu'elle veut.
- Eh bien, reviens demain, nous allons essayer de la satisfaire.
- Merci, dit la vieille, en saluant du menton, comme ma chérie sera contente !
- Nous voilà beaux, fit le bois après son départ, qu'allons-nous faire?
Il appela sous la mousse les petites graines qui attendaient la chaleur pour lancer leurs pousses neuves.
- Y a-t-il parmi vous des fleurs blanches?
- Bien entendu, firent des centaines de voix menues, mais il fait trop froid pour sortir.
- Allons, allons, n'y en a-t-il pas une un peu courageuse?
- Moi, dit une petite voix et une perce-neige apparut au gazon. Je suis même fort en retard, c'est la faute des pâquerettes qui ne voulaient pas que je naisse avant elles. Combien de mes sœurs désirez-vous, cher bois ?
- Je veux un tapis blanc à perte de vue.
La perce-neige agita sa clochette :
- Venez, venez, mes amies !
Si vous aviez vu comme c'était beau toutes ces fleurettes qui jaillissaient. On eût dit que la terre en était éclairée par-dedans.
Le lendemain, quand la grand-mère revint, sa petite fille l'accompagnait pâlotte et triste ; mais, dès la lisière du bois son visage s'illumina :
- De la neige en fleurs ! s'écria-t-elle, rose d'émoi
Quand elle eut rempli son panier, un saule lui offrit un rameau aux bourgeons de bourre argentée, et sa joie fut complète.
Le bois souriait doucement pour lui seul. Il y avait de quoi, n'est-ce pas ? |
Boucle d'or et les trois ours Tout près de la forêt habitait une petite fille qui avait les cheveux si blonds et si bouclés qu'on l'appelait "Boucle d'Or".
Dans la forêt, près de la maison de Boucle d'Or, vivait une famille ours.
Il y avait le grand ours, le moyen ours et le petit ours.
Comme il faisait très beau ce jour là et parce que la soupe était bien trop chaude pour être mangée tout de suite, les trois ours décidèrent de faire une petite promenade en attendant que le déjeuner refroidisse un peu.
Ils sortirent donc tous les trois laissant derrière eux la porte de la maison entrouverte; ils ne craignaient pas les voleurs.
Boucle d'Or ce jour là avait aussi eu l'envie de se promener dans la forêt et, chemin faisant, elle arriva près de la maison des trois ours.
Elle frappa à la porte mais n'entendit aucune réponse.
Alors comme elle était bien curieuse de savoir qui pouvait vivre ici elle entra.
En arrivant dans la salle à manger elle remarqua sur la table trois bols de soupe.
Elle s'approcha du grand bol, celui du grand ours, goûta la soupe et la trouva bien trop chaude.
Elle s'approcha alors du moyen bol, celui du moyen ours, goûta la soupe et la trouva bien trop salée.
Elle s'approcha enfin du petit bol, celui du petit ours, goûta la soupe et la trouva tellement à son goût qu'elle la mangea jusqu'à la dernière goutte.
Ensuite elle voulut s'asseoir.
Elle s'assit sur la grande chaise, celle du grand ours, mais la trouva bien trop haute.
Elle s'assit sur la moyenne chaise, celle du moyen ours, mais la trouva trop bancale.
Elle s'assit alors sur la petite chaise, mais comme Boucle d'Or était trop lourde, elle la cassa.
"Ce n'est pas grave, se dit-elle, continuons la visite".
Elle vit alors un escalier au bout de la pièce et entreprit de le monter.
Arrivée en haut elle vit une grande chambre à coucher dans laquelle se trouvaient trois lits: un grand, un moyen et un petit.
Elle se coucha sur le grand lit, celui du grand ours évidemment, mais elle le trouva trop dur, alors elle se coucha sur le moyen lit, celui du moyen ours bien entendu, mais elle le trouva trop mou.
Enfin elle se coucha sur le petit lit, celui du petit ours, cela va de soi, et elle le trouva tout à fait comme il faut alors elle s'y endormit.
Les trois ours, comme ils avaient terminé leur petite promenade, rentrèrent à la maison.
Le grand ours
voyant son bol s'écria:
"quelqu'un a touché à ma soupe!!"
Le moyen ours
voyant son bol s'exclama:
"quelqu'un a touché à ma soupe!!"
Le petit ours
regardant son bol dit:
"quelqu'un a mangé toute ma soupe!!"
.
Le grand ours
avança dans la pièce et vit sa chaise:
"quelqu'un s'est assis sur ma chaise!!"
Le moyen ours,
s'avançant alors vers sa chaise affirma:
"quelqu'un s'est aussi assis sur ma chaise!!"
Et le petit ours,
comme il se doit, s'approchant à son tour pleurnicha:
"quelqu'un a cassé ma chaise!!"
D'un pas décidé le grand ours se dirigea vers l'escalier qu'il grimpa quatre à quatre suivi par le moyen ours et par le petit ours qui séchait ses larmes.
Le grand ours
une fois dans la chambre avança vers son lit:
"quelqu'un s'est couché sur mon lit!!"
Le moyen ours
s'approchant aussi dit :
"quelqu'un s'est couché également sur mon lit!!"
Et le petit ours
alors s'étonna:
"Il y a quelqu'un sur mon lit!!"
Boucle d'Or, réveillée par la voix des ours, ouvrit les yeux et vit les trois ours penchés au-dessus d'elle.
Elle eut très peur et, voyant la fenêtre ouverte, elle s'y précipita et sauta par dessus pour courir vite jusque chez elle!
Les trois ours ne la revirent plus jamais.
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Le chat botté
de Charles Perrault
Un meunier ne laissa pour tous biens à trois enfants qu'il avait, que son moulin, son âne et son chat. Les partages furent bientôt faits, ni le notaire, ni le procureur n'y furent point appelés. Ils auraient eu bientôt mangé tout le pauvre patrimoine. L'aîné eut le moulin, le second eut l'âne, et le plus jeune n'eut que le chat. Ce dernier ne pouvait se consoler d'avoir un si pauvre lot:
- Mes frères, disait-il, pourront gagner leur vie honnêtement en se mettant ensemble; quant à moi, lorsque j'aurai mangé mon chat, et que je me serai fait un manchon de sa peau, il faudra que je meure de faim.
Le chat qui entendait ce discours, mais qui n'en fit pas semblant, lui dit d'un air posé et sérieux:
- Ne vous affligez point, mon maître, vous n'avez qu'à me donner un sac, et me faire faire une paire de bottes pour aller dans les broussailles, et vous verrez que vous n'êtes pas si mal partagé que vous croyez.
Quoique le maître du chat n'y croyait guère, il lui avait vu faire tant de tours de souplesse, pour prendre des rats et des souris, comme quand il se pendait par les pieds, ou qu'il se cachait dans la farine pour faire le mort, qu'il ne désespéra pas d'en être secouru dans sa misère.
Lorsque le chat eut ce qu'il avait demandé, il se botta bravement et, mettant son sac à son cou, il en prit les cordons avec ses deux pattes de devant, et s'en alla dans une garenne où il y avait grand nombre de lapins. Il mit du son et des lasserons dans son sac, et s'étendant comme s'il eût été mort, il attendit que quelque jeune lapin peu instruit encore des ruses de ce monde, vint se fourrer dans son sac pour manger ce qu'il y avait mis. À peine fut-il couché, qu'il eut satisfaction; un jeune étourdi de lapin entra dans son sac, et le maître chat tirant aussitôt les cordons le prit et le tua sans miséricorde. Tout fier de sa proie, il s'en alla chez le roi et demanda à lui parler. On le fit monter à l'appartement de sa majesté où, étant entré il fit une grande révérence au roi, et lui dit:
- Voilà, sire, un lapin de garenne que monsieur le Marquis de Carabas (c'était le nom qu'il lui prit en gré de donner à son maître), m'a chargé de vous présenter de sa part.
- Dis à ton maître, répondit le roi, que je le remercie, et qu'il me fait plaisir.
Une autre fois, il alla se cacher dans du blé, tenant toujours son sac ouvert; et lorsque deux perdrix y furent entrées, il tira les cordons, et les prit toutes deux. Il alla ensuite les présenter au roi, comme il avait fait avec le lapin de garenne. Le roi reçut encore avec plaisir les deux perdrix, et lui fit donner à boire. Le chat continua ainsi pendant deux ou trois mois à porter de temps en temps au roi du gibier de la chasse de son maître.
Un jour qu'il sut que le roi devait aller à la promenade sur le bord de la rivière avec sa fille, la plus belle princesse du monde, il dit à son maître:
- Si vous voulez suivre mon conseil, votre fortune est faite; vous n'avez qu'à vous baigner dans la rivière à l'endroit que je vous montrerai, et ensuite me laisser faire.
Le Marquis de Carabas fit ce que son chat lui conseillait, sans savoir à quoi cela serait bon. Pendant qu'il se baignait, le roi vint à passer, et le chat se mit à crier de toutes ses forces:
- Au secours, au secours, voilà Monsieur le Marquis de Carabas qui se noie!
À ce cri le roi mit la tête à la portière, et reconnaissant le chat qui lui avait apportétant de fois du gibier, il ordonna à ses gardes qu'on allât vite au secours de Monsieur le Marquis de Carabas.
Pendant qu'on retirait le pauvre marquis de la rivière, le chat s'approcha du carrosse,et dit au roi que dans le temps que son maître se baignait, il était venu des voleurs qui avaient emporté ses habits, quoiqu'il eût crié au voleur de toutes ses forces; le drôle les avait cachés sous une grosse pierre. Le roi ordonna aussitôt aux officiers de sa garde-robe d'aller chercher un de ses plus beaux habits pour monsieur le Marquis de Carabas. Le roi lui fit mille caresses, et comme les beaux habits qu'on venait de lui donner relevaient sa bonne mine (car il était beau, et bien fait de sa personne), la fille du roi le trouva fort àson gré, et le Marquis de Carabas ne lui eut pas jeté deux ou trois regards fort respectueux, et un peu tendres, qu'elle en devint amoureuse à la folie.
Le roi voulut qu'il montât dans son carrosse, et qu'il fût de la promenade. Le chat ravi de voir que son dessein commençait à réussir, prit les devants, et ayant rencontré des paysans qui fauchaient un pré, il leur dit:
- Bonnes gens qui fauchez, si vous ne dites au roi que le pré que vous fauchez appartient à Monsieur le Marquis de Carabas, vous serez tous hachés menu comme chair à pâté.
Le roi ne manqua pas àdemander aux faucheurs à qui était ce pré qu'ils fauchaient.
- C'est à monsieur le Marquis de Carabas, dirent-ils tous ensemble, car la menace du chat leur avait fait peur.
- Vous avez là un bel héritage, dit le roi au Marquis de Carabas.
- Vous voyez, sire, répondit le marquis, c'est un pré qui ne manque point de rapporter abondamment toutes les années.
Le maître chat, qui allait toujours devant, rencontra des moissonneurs, et leur dit:
- Bonnes gens qui moissonnez, si vous ne dites que tous ce blé appartient àmonsieur le Marquis de Carabas, vous serez tous hachés menu comme chair à pâté.
Le roi, qui passa un moment après, voulut savoir à qui appartenaient tout ce blé qu'il voyait.
- C'est à monsieur le Marquis de Carabas, répondirent les moissonneurs, et le roi s'en réjouit encore avec le marquis.
Le chat, qui allait devant le carrosse, disait toujours la même chose à tous ceux qu'il rencontrait; et le roi était étonné des grands biens de monsieur le Marquis de Carabas.
Le maître chat arriva enfin dans un beau château dont le maître était un ogre, le plus riche qu'on ait jamais vu, car toutes les terres par où le roi avait passé étaient sous la dépendance de ce château. Le chat, qui eut soin de s'informer qui était cet ogre, et ce qu'il savait faire, demanda à lui parler, disant qu'il n'avait pas voulu passer si près de son château, sans avoir l'honneur de lui faire la révérence. L'ogre le reçut aussi civilement que le peut un ogre, et le fit reposer.
- On m'a assuré, dit le chat, que vous aviez le don de vous changer en toute sorte d'animaux, que vous pouviez, par exemple, vous transformer en lion, en éléphant?
- Cela est vrai, répondit l'ogre brusquement, et pour vous le montrer, vous allez me voir devenir lion.
Le chat fut si effrayé de voir un lion devant lui, qu'il gagna aussitôt les gouttières, non sans peine et sans péril, car ses bottes ne valaient rien pour marcher sur les tuiles. Quelques temps après le chat, ayant vu que l'ogre avait quitté sa première forme, descendit, et avoua qu'il avait eu bien peur.
- On m'a assuré encore, dit le chat, mais je ne saurais le croire, que vous aviez aussi le pouvoir de prendre la forme des plus petits animaux, par exemple, de vous changer en un rat, en une souris; je vous avoue que je tiens cela tout à fait impossible.
-Impossible? reprit l'ogre, vous allez voir, et aussitôt il se changea en une souris qui se mit à courir sur le plancher.
Le chat ne l'eut pas plus tôt aperçue qu'il se jeta dessus et la mangea.
Cependant le roi, qui vit en passant le beau château de l'ogre, voulut y entrer. Le chat, qui entendit le bruit du carrosse qui passait sur le pont-levis, courut au-devant, et dit au roi:
- Votre majesté soit la bienvenue dans le château de monsieur le Marquis de Carabas.
- Comment Monsieur le Marquis, s'écria le roi, ce château est encore à vous! Il n'y a rien de plus beau que cette cour et que tous ces bâtiments qui l'environnent: voyons-en l'intérieur, s'il vous plaît.
Le marquis donna la main à la jeune princesse, et suivant le roi qui montait le premier, ils entrèrent dans une grande salle où ils trouvèrent une magnifique collation que l'ogre avait fait préparer pour ses amis qui devaient venir le voir ce même jour, mais qui n'avaient pas osé entrer, sachant que le roi y était.
Le roi, charmé des bonnes qualités de monsieur le Marquis de Carabas, de même que sa fille qui en était folle, et voyant les grands biens qu'il possédait, lui dit, après avoir bu cinq ou six coupes:
- Il ne tiendra qu'à vous, Monsieur le Marquis, que vous ne soyez mon gendre.
Le marquis, faisant de grandes révérences, accepta l'honneur que lui faisait le roi; et le même jour épousa la princesse.
Le chat devint grand seigneur, et ne courut plus après les souris que pour se divertir.
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Les trois souhaits
d'après Charles Perrault
Il était autrefois dans une lointaine forêt un bûcheron qui vivait tant bien que mal dans une modeste cabane en compagnie de son épouse.
Le matin il allait par les bois scier, abattre, couper, tailler les arbres et débroussailler, ce qui lui permettait de vivre tranquille avec Fanchon sa compagne.
Bien entendu ils ne vivaient pas dans le luxe mais après tout se disaient-il sagement, le peu que nous avons nous contente.
Parfois ils se prennaient l'un et l'autre à rêver d'une autre vie, une vie d'opulence, de richesses, d'or, de bijoux mais tout cela restait du domaine du rêve.
Un jour que Blaise, le bûcheron, s'apprêtait à donner son premier coup de hache matinal, il entendit un bruit étrange qu'il ne reconnaissait pas.
Il avait l'habitude des bruits de la forêt: le craquement des vieilles branches, le sautillement des oiseaux sur les feuilles sèches, l'appel du coucou ou de la mésange, le croassement des grenouilles... tout cela il les avaient entendus maintes et maintes fois, mais ce bruit là, c'était la première fois.
Bien qu'il n'était pas d'un caractère inquiet, il n'était pas non plus parmi les hommes les plus téméraires. Il essaya de ne plus y prêter attention, mais le bruit revint plus fort encore. La hache à la main il fit quelques pas autour de l'arbre mais il ne vit absolument rien.
Il s'apprêtait une nouvelle fois à se remettre à l'ouvrage mais le bruit se fit plus distinct et, la hache levée, il entendit clairement une voix caverneuse et puissante s'adresser à lui:
"Bûcheron de la forêt, le moment est venu pour toi de réaliser trois de tes voeux les plus chers"
Le bûcheron, ayant posé sa hache, tourna une nouvelle fois autour de l'arbre. Mais, pas plus que l'instant d'avant il ne découvrit la source de ces paroles. Et la voix recommença:
"Bûcheron de la forêt, le moment est venu pour toi de réaliser trois de tes voeux les plus chers"
Sans doute enhardi par la curiosité, Blaise s'adressa à l'arbre:
- Est-ce toi l'arbre qui me parle?
Mais seul le vent lui répondit. Alors, essayant à nouveau de chasser ce souvenir de son esprit, Blaise reprit sa hache et s'apprêta à se remettre au travail. Comme il faut s'en douter, une troisième fois la voix s'éleva:
"Bûcheron de la forêt, le moment est venu pour toi de réaliser trois de tes voeux les plus chers"
Cette fois-ci le bûcheron osa davantage encore et s'adressa au ciel:
- Est-ce toi le ciel qui me parle?
Et seul le vent lui répondit. Devant un aussi grand mystère Blaise décida de renoncer à couper son arbre et prit le chemin du retour.
Arrivé à la cabane il trouva Fanchon en train de soigner leurs trois maigres poules.
- Fanchon, Fanchon, appela-t-il, viens donc que je te raconte l'aventure qui m'arrive.
Fanchon un peu surprise de voir son Blaise déjà de retour de la forêt, jeta les derniers grains aux poules et arriva près de lui. Ils s'assirent sur le banc de pierre et là Blaise en lui tenant la main lui raconta.
- C'était une voix.. une voix qui venait de nulle part! Trois souhaits disait-elle...
- Eh bien, ce sera sans doute l'esprit de la forêt ou des campanules, qu'importe d'où elle vient puisqu'elle nous veut du bien!
- Tu as sans doute raison ma Fanchon... qu'importe qui elle est si trois de nos souhaits peuvent se réaliser! Qu'allons nous donc souhaiter ma Fanchon? Des coffres remplis d'or?
Fanchon pensive s'imaginait puisant dans de grands coffres pour aller s'offrir robes et bijoux mais l'air plus raisonable tout à coup elle dit:
- À quoi nous servirait la richesse si nous venons à tomber malades? Peut-être faudrait-il souhaiter la santé?
- Tu as raison Fanchon, peut-être le premier souhait doit être celui de la santé... comme c'est difficile de choisir
Ils restèrent là pensifs et le temps passait sans qu'ils s'en aperçoivent. Tant et si bien que l'appétit commença à s'éveiller dans l'estomac de Blaise et, sans beaucoup de bon sens il s'écria:
- Ah! tout cela m'a creusé et je souhaiterai bien voir là tout de suite une bonne livre de bon boudin frais!
À peine eut-il finit de proférer ces paroles qu'une bonne livre de boudin frais apparut dans un grand plat, là, juste devant leurs yeux ébahis!
- Misère! Comme tu es sot mon Blaise! cria Fanchon en se levant d'un bond du banc. Voilà bien ton pauvre esprit qui se met à souhaiter du boudin alors que nous n'avons que trois souhaits! Mais que peux-tu bien avoir dans ton cerveau pour ne point réfléchir plus que ça?!!
Blaise, bien penaud de son erreur, se fâcha lui aussi contre lui, mais surtout contre sa femme qui ne cessait de l'accabler.
- Tout le monde peut se tromper! Te voilà bien avancée de te mettre dans un tel état contre moi! Tu n'avais qu'à proposer ton voeu au lieu de me laisser là avec la faim au ventre!
et par une grande étourderie causée sans doute par la colère Blaise ajouta:
- Que ce boudin te pende au nez, toi qui prétends ne jamais te tromper!
Et, tout aussitôt, la bonne livre de boudin frais vint tranquillement se coller sur le nez de la pauvre Fanchon!
Elle ne savait pas si elle devait en rire ou en pleurer tellement la situation était incongrue et cocasse! Alors que pour la première fois de leur vie ils allaient pouvoir réaliser leurs rêves, elle se retrouvait là, devant leur pauvre cabane, un boudin lui pendant au nez!
Et elle avait beau tirer dessus, impossible de l'enlever de là et, pire encore pour elle, ce bout de boudin là l'empêchait de parler se mettant en travers de sa bouche à chaque fois qu'elle tentait de l'ouvrir.
Blaise lui, se taisait également, non pas que le boudin l'empêchait de s'exprimer, mais qu'il ne trouvait point de mot pour dire ses sentiments. Il restait hébété de ce qu'il venait de voir, de ce qu'il venait de faire avec d'aussi sots souhaits!
- Eh bien, ma petite Fanchonnette, bredouilla-t-il au bout de quelques minutes de silence, plus besoin de nous tracasser pour trouver le troisième souhait... la seule chose que je désire maintenant c'est que ce boudin retourne dans le plat et que tu redeviennes aussi jolie qu'avant avec ton si mignon petit bout de nez...
Et, ce souhait énoncé, le boudin quitta la figure de Fanchon et elle se retrouva comme elle était au début de l'histoire.
- Il ne nous reste plus qu'à le faire cuire et à nous régaler, se mit à rire Blaise. Voilà bien notre bonheur Fanchon, plus que toutes les pièces d'or du monde et tous les souhaits qui causent du tracas, je préfère ton minois et ta douce et tendre compagnie.
Devant leur humble logis, Fanchon et Blaise s'embrassaient et rêvaient pendant que le boudin grésillait dans la poêle.
La nuit était tombée et le récit ainsi s'achève. |
Peau d'âne d'après Charles Perrault
Il était une fois, comme bien souvent dans les contes, un roi, une reine et une jeune princese.
À cette époque on ne pouvait trouver famille plus heureuse sur la terre. En plus de ce bonheur le roi possédait un âne merveilleux. Cet âne, au lieu de déposer du crottin comme tous les autres ânes, faisait de l'or chaque jour sur sa litière! Imaginez-vous cela?
Ainsi la vie se déroulait paisiblement et tous les matins le roi, la reine, la princesse et l'âne , entourés de tous les gens de la cour, se réveillaient heureux d'exister, heureux d'être ensemble, heureux de n'avoir nul souci.
Mais, comme parfois dans la vie, il arriva que ce bonheur fut assombri par une étrange maladie qui s'empara de la reine. Celle-ci dépérissait et lorsqu'elle fut près de mourir elle appela le roi son époux et lui fit part d'une dernière demande:
-"Cher époux, lui dit-elle, lorsque je ne serai plus là, il faudra vous remarier un jour; promettez-moi de n'épouser que quelqu'un digne de vous, quelqu'un qui me ressemble ou, mieux encore, quelqu'un qui me surpasse".
Le roi pleura et dit qu'il préférait mourir avec elle plutôt que de penser à une autre, mais, malgré tout, il lui fit cette promesse, sachant que nulle part il ne trouverait épouse supérieure en grâce, en beauté, en intelligence, en amour à celle qui le quittait pour toujours.
Le roi se retrouva donc avec la princesse et l'âne merveilleux, entourés de tous les gens de la cour et ces derniers commencèrent à lui conseiller de chercher maintenant une nouvelle épouse. Le roi refusait d'y penser, mais, comme il était roi, il dut tout de même s'y résigner et tous les jours qui suivirent, ses conseillers lui apportèrent des portraits de princesses toutes disposées à l'épouser. Et, chaque jour, le roi jetait un oeil triste sur ces portraits et trouvait que l'une avait un trop grand nez , l'autre de trop petites oreilles, la troisième des trop épais cheveu. Chaque fois il trouvait un détail pour refuser telle ou telle princesse, sans vouloir avouer qu'il pensait toujours à sa femme.
Un jour, alors qu'il regardait encore d'un oeil distrait les portraits du jour, il tourna son regard vers la fenêtre et aperçut sa fille qui avait bien grandi depuis. Elle était assise sur la margelle du puits dans le parc du château et contemplait les fleurs qui revenaient annonçant le printemps. A mieux y regarder encore le roi se dit qu'elle était aujourd'hui devenue une magnifique princesse, bien plus belle et plus aimable que toutes celles que lui proposaient ses conseillers. Il la fit venir et lui dit:
-"J'ai promis à ta maman, le jour où elle est partie pour l'au-delà, de n'épouser qu'une princesse qui la surpasserait en grâce et en beauté. Tu es celle-ci. Voudrais-tu m'épouser?"
La princesse n'en croyait pas ses oreilles!!! Comment??? Me marier avec mon père???? Elle ne sut quoi répondre et partit en courant vers la où vivait sa marraine, la fée Lilas. Elle arriva près d'elle et fondit en larmes.
- Que se passe-t-il, lui demanda la fée Lilas en lui passant la main dans ses longs cheveux d'or. Quel est ce gros chagrin ma petite filleule?
- Marraine!! C'est horrible!! Mon père veut que je devienne sa femme!!
- Effectivement, répondit sa marraine, c'est... c'est quelque chose de vraiment bien surprenant de sa part. Peut-être que sa trop grand tristesse l'a rendu un peu fou. Écoute-moi, voilà ce que tu vas faire. Tu vas lui dire qu'il te faut du temps pour réfléchir et que de toutes façons tu ne pourras l'épouser que s'il te donne... une robe couleur du temps. À mon avis, cela lui sera impossible et ainsi tu ne seras ni obligée de désobéir à ton père, ni obligée de te marier avec lui! N'est-ce pas là une bonne idée?
- Je ne sais pas Marraine, je vais essayer.
La princesse rentra donc au palais et alla trouver son père pour lui dire ce que la fée Lilas lui avait conseillé de dire. Le roi alors appela tous les meilleurs couturiers du pays et leur ordonna de faire, dans la nuit même, une couleur du temps. Et, bien qu'il ne fut pas méchant, il les menaça pourtant de leur faire couper la tête s'ils n'y parvenaient pas.
Les couturiers se mirent au travail et dès le lendemain ils apportèrent à la princesse une magnifique robe couleur du temps, aux reflets bleus et blancs et légère comme un pétale. La princesse les remercia et courut une nouvelle fois vers la forêt pour y rejoindra sa marraine, la fée Lilas.
- Marraine! Marraine! Mon père m'a offert ce matin la robe couleur du temps que je lui avais demandée! Que faire maintenant!!??
- Je sais, dit la fée Lilas en réajustant son long voile de tulle, tu vas lui dire qu'il te manque encore une robe... une robe couleur de lune! Cette fois-ci ça m'étonnerait qu'il y parvienne.
Alors la princesse repartit en courant pour faire cette nouvelle requête à son père. Il était bien un peu surpris par tous ces caprices; la princesse n'exigeait jamais rien autrefois! Mais, tellement soucieux de lui plaire, il accepta et convoqua de nouveau tous les meilleurs couturiers du pays.
- "Il me faut pour demain matin une robe couleur de lune. Faites vite et surtout ne me décevez pas ou sinon... on vous coupera la tête".
Non par crainte d'un tel châtiment, que le roi sans doute n'aurait pas fait exécuter, ils se mirent de nouveau au travail et toute la nuit confectionnèrent une superbe robe couleur de lune. Au matin ils l'apportèrent à la princesse qui n'en croyait pas ses yeux. Cette nouvelle robe brillait comme une pleine lune au milieu des étoiles et son tissu était soyeux comme un ciel d'été. Elle courut dans la forêt une nouvelle fois pour alerter sa marraine la fée Lilas.
- Marraine! Marrraine! Le roi m'a offert ce matin la robe couleur de lune que je lui avais demandée!! Que faire maintenant??!!
- Bien, bien, bien... dit la fée Lilas, très calmement... alors cette fois-ci tu n'as qu'à lui demander une robe... une robe couleur soleil!!
Et la princesse, confiante, retourna vers le château et alla voir son père pour lui demander cette fois la robe couleur soleil.
Les meilleurs couturiers, qui n'étaient pas partis bien loin car ils se reposaient de leurs deux nuits de travail, furent réveillés par la voix tonitruante du roi qui leur demandait cette fois, de faire, dans la nuit, une robe couleur soleil. Il n'eut pas même besoin de préciser qu'évidemment s'ils n'y parvenaient pas il leur ferait couper la tête. Les couturiers se consultèrent et ensemble se mirent au travail.
Ils firent tant et si bien qu'au matin ils apportèrent à la princesse une magnifique robe resplendissante, éclatante, brillant de tous les feux d'un soleil de printemps. La princesse en fut presqu'éblouie et les gens de la cour s'extasiaient devant cette splendide lumière qui brillait ainsi autour de la princesse!
Alors que le roi approchait, une nouvelle fois la princesse partit en courant en direction de la , chercher une nouvelle fois un conseil auprès de sa marraine, la fée Lilas!
- Marraine! Marraine!
- Oui, je sais... tu viens sûrement me dire que le roi t'a offert ce matin même une robe couleur soleil, c'est bien cela?
- Oui marraine une robe magnifique qui brille de tous les feux d'un soleil de printemps! Que faire??!!!
- Écoute moi bien. Je crois que cette fois-ci le roi ne va pouvoir répondre à ta demande. Cette fois tu vas lui demander... la peau de son âne chéri!
- La peau de son âne?!! Mais Marraine je ne peux pas lui demander une telle chose! Cet âne est pour lui non seulement un merveilleux compagnon mais encore une véritable mine d'or, une inépuisable fortune!
- C'est bien pour ça qu'il ne pourra pas te l'accorder et ainsi tu n'auras ni à lui désobéir ni à l'épouser!
Alors la princesse retourna au château et, d'une voix tremblante, elle réclama au roi... la peau de son âne.
Le roi fut extrêmement étonné d'une telle demande, mais plus encore la princesse fut surprise de le voir accepter.
- Que ne ferais-je pour toi, ma princesse, pour qu'enfin tu consentes à devenir ma femme, soupira le roi.
Et il ordonna à ses laquais d'aller chercher la peau de son âne pour en faire don à sa fille.
Cette fois-là, la princesse n'eut pas à courir vers la forêt. Sa marraine était venue et assistait sans sourciller à cette étrange scène.
Une fois seules, la princesse et la fée Lilas, cette dernière s'approcha et lui glissa à l'oreille.
- Tout se passe comme il faut; voici maintenant pour toi un extraordinaire déguisement pour quitter le château dès cette nuit. Vêts-toi de cette peau d'âne et attends au coin de l'allée près de la forêt, un carrosse te conduira loin d'ici et tu ne craindras plus ni de désobéir à ton père, ni de l'épouser. Emporte aussi avec toi cette baguette magique. Lorsque tu voudras faire apparaître la malle qui contient tes robes et tes bijoux, tu n'auras qu'à taper trois petits coups de baguette et elle apparaîtra.
La princesse, toujours confiante dans les conseils de sa marraine, fit comme elle lui avait dit et, à la nuit tombée, vêtue de la peau d'âne elle prit la baguette magique et se rendit au bout de l'allée où un carrosse l'attendait.
Le carosse la mena fort loin puis s'arrêta. Elle en descendit et à pied elle continua sa route sans bien savoir jusqu'où cela l'entrainerait.
Au Château de Breteuil
Parvenue à une ferme, elle entra pour y demander quelque chose à manger et un endroit où se reposer car elle avait longtemps marché. La femme qui la reçut lui dit qu'elle n'aurait rien ainsi gratuitement, mais que précisément elle cherchait une souillon pour s'occuper des dindons, des moutons et des cochons; en guise de salaire elle serait nourrie et logée. Peau d'âne, puisque tel fut son nom désormais, accepta et commença sa tâche.
Les autres servants et commis de la ferme se moquaient d'elle, lui lançaient des injures, sortaient des plaisanteries qui ne faisaient rire qu'eux, lui disaient qu'elle sentait mauvais, que les cochons devaient la prendre pour une des leurs. Pas un seul ne montra un peu de compassion pour elle. Peau d'âne vivait donc seule dans cette cabane un peu à l'écart de la ferme que lui avait attribuée la patronne du lieu pour qu'elle n'empeste pas et n'incommode pas les autres avec sa crasse et son odeur de peau d'âne.
Parfois le soir, lorsqu'elle avait terminé sa besogne Peau d'âne, pour se consoler, prenait la baguette magique et tapait trois petits coups pour faire apparaître sa malle chargée de robes et de bijoux. Et là, rien que pour elle, Peau d'âne s'habillait en princesse; ce qu'elle n'avait jamais cessé d'être.
Le temps s'écoulait ainsi, laissant Peau d'âne en sa cabane et le roi tout à sa tristesse d'avoir vu revenir gendarmes et soldats sans qu'aucun ne lui apporte la moindre nouvelle de sa fille.
Puis un jour il y eut une grande fête à la ferme pour célébrer la fin des moissons. Tous dansaient, mangeaient et buvaient ensemble, seule Peau d'âne était restée à l'écart, dans son humble logis. Sachant que personne ne l'y viendrait voir elle revêtit ce jour là sa robe couleur d'or. Le prince du château voisin, à qui appartenait la ferme, était venu pour les festivités et après avoir admiré la récolte de l'année, comme il faisait le tour de la ferme, il aperçut une étrange lumière. S'approchant de la cabane de Peau d'âne, par un des carreaux, il l'aperçut et fut ébloui! Non pas par l'éclat de sa robe, mais par la grâce et la beauté de la princesse. Il fut tellement surpris qu'il n'osa pas même frapper à la porte.
Il fit demi-tour, alla trouver les gens de la ferme et il les questionna pour savoir quelle était cette magnifique jeune fille qui résidait dans la cabane. Ils se mirent tous à rire, pensant que le prince avait bu ou que le soleil lui avait tapé sur la tête: "Peau d'âne?? une magnifique jeune fille??!! ah!!! ah!!! ah!!! Elle est bien bonne celle-là!!! C'est la souillon qui s'occupe des dindes, des poules et des cochons!!"
Le prince, sans bien comprendre leur hilarité, rentra chez lui, car sa mère l'attendait. Mais il n'était plus tout à fait le même. Il se coucha et refusa de souper. Son père alors demanda à sa femme ce que pouvait bien avoir leur fils; lui qui d'habitude mangeait comme quatre, n'avait, ce soir, touché à aucun plat. Ils montèrent donc le voir et, inquiets firent même venir le médecin de la cour qui ne sut se déterminer sur la nature du mal dont souffrait le prince.
- "Mon fils que se passe-t-il? Tu n'as rien mangé? N'as-tu pas faim? As-tu envie de quelque chose qu'on ne t'a pas apporté sur le plateau?"
- Veux-tu un autre cheval pour galoper plus vite? Veux-tu que l'on donne un bal pour toi? Veux-tu... ses parents ne savaient plus quoi lui proposer lorsqu'il se décida à parler
- Maman, puisque tu me le demandes je peux bien te le dire... je voudrais... je voudrais un gâteau!!
- Un gâteau lui dit sa mère, mais tu en as là une dizaine!! J'y ai fait mettre tes gâteaux préférés! Celui à la framboise dont tu raffoles! et celui au chocolat dont tu te délectes! et celui-ci à la pomme que tu adores et...
Mais le prince ne laissa pas sa mère terminer sa phrase :
- Maman! écoute moi.. je veux un gâteau... un gâteau de Peau d'âne!!"
- "Podane"? Qui est-ce celui là?? Un nouveau pâtissier dans le pays?
- Non, maman pas du tout... c'est... c'est...
- Peau d'âne est la souillon qui s'occupe des des dindons et des cochons dans votre ferme voisine déclara le médecin qui était resté auprès du prince.
- Notre fils est devenu fou!!!! Notre fils est devenu fou!! -S'écria la reine. Il veut s'empoisonner!!!
Son mari, qui s'était éloigné un instant, accouru attiré par ses cris.
- Que se passe-t-il?
- Notre fils est devenu fou!!! Il veut un gâteau de Peau d'âne!!
- Podane? Ne serait-ce pas un nouveau patiss...
- Non, l'interrompit sa femme... c'est la souillon qui s'occupe des dindes, des moutons et des cochons dans notre ferme voisine!!
- Effectivement, dit le roi en examinant son fils d'un oeil inquiet, il est peut-être devenu fou. Ne t'es-tu pas cogné la tête à une branche d'arbre en galopant trop rapidement dans la forêt?
Le prince, sans se soucier de la question de son père, répêta...
- S'il vous plait... faites moi venir un gâteau que Peau d'âne aura fait pour moi... s'il vous plait! J'ai faim de ce gâteau là.
Voyant que pour le moment il n'y avait rien d'autre à faire qu'à céder à ce caprice, les parents du prince envoyèrent un de leur laquais pour demander à Peau d'âne de confectionner un gâteau pour le prince.
Peau d'âne ne parut même pas surprise par cette étrange requête. Elle se retira dans sa cabane, frappa le sol trois fois avec sa magique baguette, enfila une de ses plus belles robes, mit ses plus beaux bijoux et commença à préparer le biscuit qu'elle savait si bien faire:
4 oeufs, 300g de sucre, 300g de farine, 300g de beurre, une cuillère à café de levure - Faites chauffer le four à 170°C (th.5). Fouettez le beurre avec la fourchette pour qu'il blanchisse. Ajoutez les oeufs un par un. Mélangez la farine et la levure. Ajoutez-les aux autres ingrédients, versez la pâte dans le moule et mettez-le aussitôt au four. Laissez cuire 30 minutes.Démoulez.
. Allez savoir comment, la bague qu'elle portait au doigt glissa au milieu de la pâte juste avant que Peau d'âne n'enfourne le gâteau. Lorsqu'enfin le gâteau fut cuit Peau d'âne le sortit du four, le mit un instant à refroidir pendant qu'elle rangeait sa robe et, en "peau d'âne", sortit pour remettre le biscuit au laquais qui attendait.
Celui-ci partit au galop porter le biscuit à la reine qui le goûta du bout des lèvres et, l'air satisfait, le tendit à son fils.
Le prince s'en saisit et se mit à le dévorer malgré les conseils de sa mère, de son père et du médecin, qui était toujours là, qui n'arrêtaient pas de lui dire de manger moins vite, de lui répéter qu'il allait s'étouffer. C'est bien d'ailleurs ce qui faillit arriver! Le prince tout à coup se mit à tousser, à tousser encore et... au beau milieu d'une quinte de toux, il réussit, sans se faire voir, à prendre la bague dans sa main et à la cacher sous son oreiller. Rassasié et heureux d'avoir ce gage près de lui, il s'endormit. Ses parents se retirèrent, et le médecin aussi.
Le lendemain matin, le prince dès son réveil semblait de fort bonne humeur. Ses parents en étaient ravis; ils étaient si contents qu'ils lui proposèrent d'organiser un bal le soir même pour fêter sa guérison. Le prince leur dit qu'il n'avait pas besoin de bal, que ce qu'il lui fallait maintenant c'était se marier au plus vite. Comme ses parents avaient cela dans l'idée depuis plusieurs mois, ils furent fort satisfaits de voir que leur fils pensait dans la même direction qu'eux. Ils lui proposèrent donc d'organiser un bal pour qu'il puisse rencontrer les princesses des royaumes alentour. Décidément ils semblaient beaucoup tenir à ce qu'il y ait un bal! Seulement le prince à ce moment là ouvrit sa main et montra la bague qu'il tenait cachée jusqu'à présent... ses parents intrigués s'approchèrent et lui demandèrent où il voulait en venir.
- Voilà, dit le prince, j'épouserai celle à qui cette bague ira.
Ses parents se rapprochèrent plus encore pour examiner attentivement cette bague. Elle semblait effectivement si étroite que seule une personne qui aurait doigts fins et gracieux pourrait l'enfiler. Ils furent donc d'accord avec cette idée un peu extravagante de leurs fils et organisèrent dès le lendemain matin, non pas un bal, mais une sorte de défilé des princesses des alentours. Le prince voulut lui-même procéder aux essayages. À la fin de la matinée toutes les princesses étaient reparties; aucune n'avait pu enfiler la bague. On fit donc venir alors les duchesses, les marquises puis les baronnes... mais toutes repartirent comme elles étaient venues. Alors vint le tour des jeunes filles bien faites du village, puis les filles de chambre, les servantes, les cuisinières, les gardeuses d'oies, toutes les filles de la région accouraient pour essayer la bague... aucune ne fut capable, malgré les efforts de certaines, aucune donc ne fut capable d'enfiler la bague.
Lorsque la dernière fut venue... et repartie, le prince demanda:
- Je n'ai pas vu Peau d'âne. Qu'on aille la chercher. Elle doit, elle aussi essayer cette bague.
Comme il ne restait qu'elle, personne ne trouva à redire cette fois. Si le prince ne craignait pas d'être incommodé par l'odeur d'une peau d'âne, qu'il fasse comme bon lui semble. Et on alla chercher Peau d'âne.
Lorqu'il la vit entrer dans la salle, le prince s'inquiéta... ne s'était-il pas trompé lorsqu'il avait regardé par la fenêtre de la cabane? Celle qu'il avait vue n'avait rien de commun avec cette souillon! Alors qu'il se faisait intérieurement toutes ces réflexions, Peau d'âne approchait et lorsqu'elle fut devant lui, le prince lui demanda sa main, pour essayer la bague. De dessous la vilaine peau d'âne, sortit une main fine et gracieuse et la bague s'ajusta sans aucune peine au plus joli doigt du monde.
La princesse fit alors glisser sa vieille peau de bête et tout le monde fut troublé de la voir alors plus resplendissante qu'elle n'avait jamais été.
Elle demanda au prince la permission d'attendre le consentement de son père pour célébrer leur mariage, ce qu'il lui accorda bien volontiers. Quelques jours plus tard, le roi vint heureux de retrouver sa fille. Il s'excusa du mal qu'il lui avait bien malgré lui causé, l'assura de son rétablissement et ce mariage fut un des plus beaux de tous les temps. On raconte que les festivités durèrent trois mois, que les rois des pays voisins y furent conviés et vinrent tous, les uns à dos d'éléphants, d'autres à dos de chameaux et les derniers à pied. On dit aussi que cent ans plus tard les jeunes mariés s'aimaient encore et que, s'ils n'étaient morts, ils s'aimeraient toujours.
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PETITES HISTOIRES DES ENFANTS |
Des
histoires
imaginées
par et pour
des enfants
petits et grands
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BON VOYAGE HERVÉ
Hervé était un petit hérisson très gentil qui allait au Collège Hérissé près de chez lui. Pour la plupart Hervé aimait son collège. Il travaillait bien dans ses cours d'informatique et il recevait toujours de bonnes notes.
Mais pour lui le clou de la semaine était, sans aucun doute, les cours de géographie.Le petit Hervé prenait un plaisir énorme à mieux connaître le monde et il rêvait d'aller visiter ces endroits fantastiques dont on lui avait parlé. "Un de ces beaux jours peut-être..." se disait-il avec une tristesse rêveuse.
Voilà, enfin ses années de scolarité étaient finies et le soir-même Hervé, un peu inquiet, s'est approché de son père. "Papa" a-t-il dit d'une voix hésitante, "avant de trouver un emploi, j'ai tellement envie de voir le monde. Tu me le permets?""Oui, bien sûr, si tu as assez d'argent", a repris son père.
Hervé avait déjà vidé sa tirelire en forme d'hippo. "Trente heros, ça suffit pour commencer! L'avenir appartient à qui se lève matin."Alors, de bon matin, après avoir dit au revoir à ses parents, Hervé est parti chercher aventure.
Chemin faisant Hervé a remarqué un poteau et écrit là-dessus étaient les mots "À VENDRE, MOTO, 25 HEROS" Quelle bonne affaire!Une demi-heure plus tard Hervé s'est retrouvé propriétaire d'une belle moto!
Avec ça, le monde était à lui et il avait le monde à ses pieds, ce qui était bel et bien vrai, car dans les premiers jours il tombait souvent de sa moto! (Mais n'en parlons pas n'est-ce pas?)
Quelles aventures merveilleuses il a eues!Il a fait du ski nautique sur le Lac Léman...
... il a vu le Sphinx en Égypte...
...et il a même visité New York où il a vu la célèbre Statue de la Liberté! Comme il fut étonné de remarquer que la statue ressemblait plutôt à un hérisson gigantesque!
Après tant d'aventures il était temps de retourner à la maison et de chercher un emploi!
Hervé a trouvé du travail comme standardiste, ce qui n'était pas très intéressant. Alors chaque jour il rêve de retourner à tous ces endroits fantastiques!Bonne chance Hervé et BON VOYAGE!
écrire à l'auteur : Liz Slack.
La maison hantée
Ce conte a été inventé dans le cadre d’un projet d’écriture par quatre élèves de la classe de CM2 de l’école Georges Debono à Sermaise (91).
Mégan, Dimitri, Charline, Steeven ont ainsi écrit ce conte
C’est l’histoire d’un jeune garçon qui tente de sauver une jeune fille emprisonnée dans une maison hantée.
Il était une fois un jeune garçon de quatorze ans et demi appelé Alexandre. Il avait les yeux marron et les cheveux blonds. Il était sage et comme tous les garçons de son âge, il adorait les pizzas.
Un beau jour, ses parents lui demandèrent, pour la première fois, d’aller chez sa tante, Paulette Gomez, en vacances. Alexandre accepta d’y aller, ses parents lui avaient assuré que sa tante était très gentille. Il partit alors sur son scooter.
Arrivé devant le domicile de sa tante, il vit que toutes les fenêtres étaient cassées et il entendit des bruits étranges et bizarres.
Inquiet, il décida d’aller se renseigner au village, et il y rencontra une vieille dame. Cette vieille dame lui dit qu’il a eu, il y a quelques années, un drame dans cette maison.
Une petite fille appelée Charlotte y était rentrée mais elle n’en était jamais ressortie. La vieille dame lui montra une photo représentant Charlotte. En voyant le portrait, il se rendit compte qu’elle était très belle . Alexandre en profita pour lui demander si la maison aux vitres cassées était habitée par une certaine Paulette Gomez. La vieille dame lui répondit que personne n’osait plus occuper cette maison. Sa vieille tante avait sans doute déménagé et ses parents s’étaient trompés d’adresse.
Plein de courage , il décida d’aller dans l’ancienne maison et de trouver Charlotte. Il poussa la porte, elle grinça comme dans les films d’horreur ; il entra dans le salon et horreur il vit des os. Tout effrayé, il trébucha et tomba à la renverse dans un fauteuil. Il y trouva une clé et il la mit dans sa poche. Il se dirigeait vers les escaliers quand tout à coup, il entendit une voix qui lui ordonna de se rendre dans la chambre du fond.
Il arriva dans la chambre et vit Charlotte assise sur le lit, il s’approcha d’elle mais immédiatement des fantômes arrivèrent.
Il eut très peur et il se mit à trembler de partout. Il comprit alors que cette vieille demeure était occupée par toute une famille d’horribles fantômes.
« Laissez-moi parler à Charlotte s’il vous plait »; fit Alexandre d’une voix tremblante. Les fantômes refusèrent ; et ils lui dirent que s’il voulait la délivrer, il lui faudrait passer des épreuves . Ils lui expliquèrent :
«Tout d’abord, il te faudra aller dans la chambre de l’oncle fantôme et prendre le manche du violon qui se trouve sous son oreiller. Puis, tu devras aller chercher les cordes du violon qui se trouvent cette fois-ci sous Bébé fantôme. Pour finir tu auras pour mission d’aller chercher le corps du violon, mais cette fois-ci nous ne te dirons pas où il se trouve ».
Alexandre ouvrit, grâce à la clé trouvée dans le fauteuil, la porte de la chambre de l’oncle fantôme et il y entra. L’oncle fantôme dormait profondément ; il avança doucement et il vit un petit morceau du manche du violon dépasser de son oreiller. Il glissa doucement sa main et l’attrapa. Il venait de réussir sa première épreuve.
Décidé à sauver Charlotte, il partit en direction de la chambre du Bébé fantôme. Il prit la clé et ouvrit la porte. Il aperçut tout de suite les cordes du violon. Il tira dessus mais elles ne venaient pas ; quelque chose les bloquait. Il insista et il les attrapa. Il allait sortir quand soudain d’affreux serpents arrivèrent et bloquèrent la porte. Alexandre frissonna et il leur lança les miettes d’un gâteau qui lui restaient dans les poches. Et grâce à ces miettes, il put s’enfuir.
Il venait de réussir sa deuxième épreuve ; il ne lui en restait alors plus qu’une. Mais qu’est-ce qu’il devait bien avoir à faire ? Il se rendit compte qu’il y avait tout au fond du couloir une troisième chambre. Il s’y rendit. Il entra et il vit qu’un horrible vampire occupait cette chambre.
Heureusement, il paraissait occupé à écrire une lettre et il ne s’aperçut même pas qu’Alexandre était dans la pièce. Alexandre prit alors doucement le corps du violon posé sur une commode et sans bruit il quitta la chambre. Il venait de réussir toutes les épreuves. Il assembla tous les morceaux du violon, et se mit à en jouer. Une musique aiguë retentit, alors les murs se mirent à trembler, les portes à claquer et Charlotte apparut.
Ils quittèrent le plus rapidement possible la maison, ils enfourchèrent le scooter d’Alexandre et s’enfuirent ensemble. La maison s’écroula .
Charlotte fut accueillie dans une famille d’accueil et devint la voisine d’Alexandre. Ils en furent très heureux.
Fin
Le tigre et le rat
Chapitre 1 - Le tigre
Ne croyez pas que les animaux d’aujourd’hui, ont toujours été ainsi, avec les mêmes fourrures, les mêmes apparences physiques. Ne serait-ce que le tigre, cet animal n’a pas toujours eu une robe à poils ras, bien au contraire. Mais voyons donc comment le tigre a changé d’aspect. Pour ce faire il faut nous remonter le cours du temps.
C’était il y a très, très longtemps, dans la jungle profonde. Jadis, vivait un tigre cruel qui terrorisait tous les animaux. Il ne se passait pas un jour sans que ce carnassier n’attaqua une autre bête pour la manger.Son rugissement suffisait à paralyser les plus peureux. Quant aux autres, les fuyards, son agilité et sa vitesse avaient tôt fait de les rattraper. Nul animal n’était à l’abri des crocs du tigre et la faune de la jungle à cette époque vivait, à chaque instant, dans la crainte de se faire dévorer .
Pourtant si ce chasseur était parfaitement silencieux, il ne passait pas inaperçu . Fort heureusement, d’ailleurs, pour les animaux qui restaient encore en vie.
En effet, en ce temps là, le tigre n’était pas tout à fait comme maintenant. Il était poilu, très poilu, très très poilu. Tout autour de son cou il avait une crinière, un peu comme un lion. En plus et surtout il avait, ce dont il était particulièrement fier, une superbe queue en panache. Une queue touffue, avec des poils longs, mais longs vous ne pouvez pas imaginer.
Ce tigre était tellement fier de sa queue en bouquet, qu’il en prenait grand soin. Il la portait droite et raide comme un i. Et c’est vrai qu’il avait fier allure, quand il courait, on avait l’impression qu’il brandissait un drapeau avec les poils de sa queue qui flottaient au vent dans la même direction. Quand il ne chassait pas, il ne se passait pas une heure sans qu’il nettoya son panache puis satisfait de lui il allait se pavaner à travers la jungle, montrant à tous qu’il était non seulement le plus fort , le plus rapide mais aussi le plus beau et bien entendu il ajouta le plus intelligent. Pour le prouver il clamait à travers la jungle que s’il existait un animal plus rapide, plus fort , plus beau ou plus intelligent que lui, il quitterait à jamais la jungle.
Jusqu’à présent les rares animaux qui avaient relevé le défi étaient dans son ventre, ce qui le rendait encore plus orgueilleux.
Les derniers animaux de la jungle se demandaient comment faire pour se débarrasser de ce tueur. La gazelle la plus rapide n’avait pas tenue la course, l’ours le plus robuste avait eu les vertèbres brisées, et un paon prétentieux s’était vu plumé en quelques secondes.
Ils avaient perdu tout espoir quand un oiseau migrateur leur fit savoir qu’il existait dans la forêt voisine un rat que l’on disait fort sage et qui pourrait peut-être avoir raison du tigre. Un messager fut envoyé pour aller demander de l’aide. Il se faufila derrière les arbres, s’enfonça dans les broussailles les plus épaisses, regarda à droite, à gauche, devant lui, derrière lui et s’il n’apercevait pas une touffe de poils qui trahirait la présence du tigre, il sautait dans le taillis le plus proche. Le tigre n’aimait guère s’arracher les poils et évitait les ronces. Si bien que de buissons en buissons, de ronces en ronces, l’ambassadeur des survivants parvint jusqu’au rat de la forêt voisine.
C’était un vieux rat, ses poils gris trahissaient son âge, il se déplaçait avec lenteur, difficilement. A le voir ainsi, l’envoyé des animaux perdit confiance. Mais il s’était déplacé au péril de sa vie jusque là, aussi il expliqua au rat la situation. Le vénérable rongeur l’écouta attentivement, l’histoire semblait l’amuser.
- Si je vous débarrasse du tigre, me laisserez vous rester dans votre jungle jusqu’à la fin de mes jours ? demanda le rat.
- En mon nom et au nom des derniers survivants nous te laisserons rester chez nous, s’engagea l’ambassadeur des animaux.
- Soit, partons, mais avant de rentrer dans ta forêt, il te faudra me rapporter dix grosses poignées de poils de la queue du tigre.
- Mais je serai mort avant, se lamenta le messager.
- Seul, oui, mais tous ensemble vous pouvez y arriver. Voilà comment vous allez faire....
Ce matin là, le tigre était particulièrement fier de lui, il s’était admiré longuement dans l’onde de la rivière, s’était trouvé superbe et cet exercice l’avait mis en appétit. Il se mit à rugir, espérant ainsi faire fuir sa prochaine victime. Il avait envie de courir. Un peu de sport avant le repas se disait-il ne pouvait pas faire de mal. Il allait être servi.
À peine avait-t-il fini de rugir qu’il aperçut à cent mètres de lui une gazelle d’aspect fort appétissant. Le tigre se pourléchait déjà les babines.
-Tant pis, la chasse sera courte, se dit-il.
En à peine cinq bonds il sautait sur l’animal. Un cri terrible foudroya le calme de la jungle, il venait de tomber dans un buisson d’épines, et il avait beau lever au maximum son arrière train, les ronces s’agrippaient aux poils de sa queue. Il perdit dans ce buisson une grosse touffe de poils. Énervé, il chercha la gazelle, elle avait disparu, mais au loin à une centaine de mètres de là un éléphant marchait paisiblement.
-Tant pis pour lui, il paiera pour la gazelle, se dit le tigre.
En cinq bonds, il sauta sur... un autre buisson plein de ronces. Un rugissement encore plus terrible que le précédent retentit. Cette fois-ci il perdit deux touffes de poils. Enragé, le tigre cherchait l’éléphant, rien, sinon qu’à quelques bonds de lui, il aperçut un gros cochon sauvage.
- Je vais le manger pour les autres, se dit le tigre.
Oubliant toute prudence tant il était en colère, il rebroussa chemin et ressauta sur.... le premier buisson où il y laissa encore deux autres touffes de poils.
Le tigre écumait, rugissait comme un fou et les yeux injectés de sang il sautait à chaque fois dans un autre buisson d’épines. Puis après un dernier saut, plus rien à l’horizon. Le tigre avait beau chercher, pas un animal en vue, pas un animal à flairer, à croire que la jungle s’était vidée de tous ses habitants.
Encore tout endolori, il alla remettre de l’ordre dans sa robe de fauve en se jurant que demain il ferait un massacre pour se venger.
Le rat lui attendait calmement l’arrivée des animaux. Quand ceux-ci le rejoignirent à la lisière de la forêt, ils étaient très fiers, non seulement aucun d’entre eux n’avait été mangé mais et surtout la ruse du rat avait marché. Ils avaient les précieuses touffes de poils demandées. Maintenant c’était au rat de remplir sa part du marché.
La nuit tombait, il donna rendez-vous aux animaux le lendemain à l’aube afin qu’ils le conduisent vers une large clairière d’où le tigre ne pouvait pas ne pas le voir. En allant s’abriter pour la nuit certains animaux pensèrent que c’était du suicide, seul en terrain découvert face au tigre. Et si le rat n’était pas de la jungle, la farce de la journée qu’il avait imaginé à l’encontre du tigre faisait de lui un animal sympathique dont on ne souhaitait pas particulièrement la mort. Mais voilà le tigre allait sans doute se venger, alors, chacun s’en retourna persuadé que le rat mangé leur donnerait quelques heures de repos.
Le rat regarda partir les animaux de son nouveau territoire, rassembla en une grosse touffe les poils du tigre, s’enfonça dans la forêt, chercha et finit par repérer un arbre dont il entailla profondément l’écorce. Puis il se lova sur les poils du tigre et s’endormit en toute confiance. Si le tigre voulait chasser cette nuit, il ne pourrait pas le repérer à cause de son odeur, avec tous les poils qu’il serrait précieusement entre ses pattes, il sentait le tigre à pleines narines.
Après une nuit paisible, le rat s’éveilla, fit sa toilette et trempa longuement sa queue dans un liquide blanchâtre et gluant qui coulait de l’écorce de l’arbre entaillé la veille, puis il se mit au travail.
Le soleil débutait sa course à l’horizon, les animaux s’impatientaient, le rat lui continuait calmement à faire on ne sait quoi avec sa queue. Il regardait le ciel, enfin quand le soleil fut à moitié de sa courbe, il se remit sur se pattes et dit :
- Allons-y
- Allez-y, répondirent les animaux qui s’empressèrent de lui montrer la clairière et s’enfuirent aussitôt dans les buissons les plus profonds.
Le tigre avait passé une nuit affreuse, il avait soigné sa pauvre queue douloureuse. Mais il était affamé, et quoique peu fier de sa mésaventure d’hier, il partit en chasse le port bien raide . Il ne lui fallut que quelques secondes pour parvenir à la clairière où se tenait le rat. En deux bonds il était sur lui, mais au moment de l’avaler comme un ogre gobe un oeuf, il s’arrêta.
- D’où te viens cette queue ? demanda le tigre intrigué, au rat.
Le rat se retourna, fit tourner sa queue qu’il tenait droite comme un i, très content de son travail. Il avait collé sur sa queue les poils du tigre que les animaux lui avaient apporté. Il avait maintenant une queue toute velue, presque aussi belle que la queue du tigre.
- Cette queue, c’est un trophée, un tigre qui se croyait plus intelligent que moi, écarte-toi de mon chemin, si tu ne veux pas perdre ton panache, répondit le rat au tigre.
- Je suis le tigre le plus intelligent, le plus beau, le plus rapide, et le plus fort nul animal n’est plus intelligent, plus rapide, plus beau et plus fort que moi. Je te mets au défi de me vaincre, si tu y arrives je te laisserai la vie sauve, ricana le tigre
Le rat, nullement impressionné, l’observa longuement, fit le tour du tigre plusieurs fois, en faisant à chaque tour frôler sa queue le plus près du tigre ce qui à chaque fois énervait un peu plus le tigre et quand le rat jugea le tigre suffisamment impatient d’en découdre avec lui, il répondit
- Je vais te laisser la vie sauve, mais tu quitteras cette jungle à jamais, quand je t’aurai battu.
Le tigre pestait, il accepta le pari pour en finir le plus rapidement possible, il avait de plus en plus faim.
- Que peux-tu faire que je ne sois pas capable de faire ? demanda-t-il sur un ton condescendant.
Le rat regarda le soleil, et dit au tigre:
-Viens ici, mets toi dos au soleil, tu vois l’ombre de ta queue à deux mètres devant toi, pose une de tes pattes dessus et tu as gagné.
Une fois placé comme le rat le demandait, la queue du tigre qu’il tenait toujours très droite et bien haute s’allongeait dans l’herbe devant lui et semblait attendre que le tigre y posa sa patte.
- Une patte de derrière alors, sinon c’est trop facile, répliqua le tigre ravi de pouvoir montrer encore une fois sa force et sa vitesse.
Il bondit d’un trait sur l’ombre de sa queue, mais quand il atterrit, elle était toujours à deux mètres de lui.
- Dommage dit le rat, essaie encore.
Le tigre bondit, dix fois, vingt fois, cent fois, sans résultat. Le rat loin de se moquer de lui le stimulait, lui donnait des conseils. Le tigre sur les conseils du rat sautait moins haut et plus vite, mais ça ne suffisait pas.
Le tigre ennuyé, lui demanda si les pattes de devant comptaient, le rat répondit que oui. Alors le tigre redoubla d’efforts, quelquefois, il se retournait pour surprendre son ombre mais elle disparaissait de sa vue instantanément, alors il recommençait dos au soleil.
- Essaie en tournant sur toi même, tu es rapide, tu vas y arriver, disait le rat
Et le tigre sautait, courait.
Et le tigre sautillait, clopinait, peinait.
- Allons encore un effort tu y es presque, regarde.
Et c’était vrai on aurait dit que plus le tigre perdait des forces, plus il se rapprochait de l’ombre de sa queue qu’il allait presque la toucher.
- Courage, oui, encourageait le rat.
Le tigre s’écrasa lourdement sur le sol, complètement épuisé, il n’arrivait même plus à bouger une oreille.
Le rat se dirigea vers le tigre, fit le tour du fauve vaincu, passa à bonne distance de ses crocs, s’approcha de lui et lui mordit la queue. C’est à peine si le tigre put émettre un son malgré la douleur. Alors le rat sauta sur le vaincu et se mit à l’épiler entièrement. Il lui arrachait ses poils par touffes entières sans se demander s’il faisait mal au tigre. Les animaux de la jungle regardait le spectacle avec envie, et maintenant entouraient le rat, trop heureux qu’ils étaient de pouvoir regarder l’agonie du tigre.Quand le rat eut entièrement rasé le tigre, le soleil était à son zénith. Le pauvre fauve reprenait juste assez de forces pour lui demander.
- A toi maintenant, mets-toi dos au soleil et marche sur l’ombre de ta queue.
Le rat n’eut aucun mal, le soleil était juste au-dessus de lui et l’ombre de sa queue était juste sous ses pieds.
Le tigre s’avoua vaincu. Il avait trouvé plus fort que lui, le rat avait réussi à lui arracher tous ses poils. Il avait trouvé plus rapide que lui, le rat avait marché sur l’ombre de sa queue.
Quant à savoir s’il pensa que le rat était plus intelligent que lui, le tigre était trop bête pour le comprendre.
Restait à se demander s’il était plus beau que le tigre.
Quand le tigre se releva, quand il vit toute sa toison éparpillée sur le sol, de honte il quitta la jungle. Lui qui était si fier de sa queue en panache quand il vit sa queue aussi nue qu’un ver de terre, humilié il la cacha entre ses pattes arrières, et s’en alla ainsi sans demander son reste. Il ne revient jamais dans la jungle et le rat termina ses jours respecté de tous.
De nos jours, encore , les félins qui viennent d’être battus par un autre animal plus fort qu’eux, s’enfuient comme notre tigre la queue basse. Les animaux de la jungle disent que cette attitude viendrait de notre pauvre tigre. Quant au tigre, depuis cette mésaventure, lui et sa descendance ont, et à jamais, perdu tout espoir de retrouver un jour leur crinière et leur queue en panache.
Miguel (également auteur de "Enfance de l'Art", édité au Centre de l'édition, Antibes, 1998
Le Cavalier et la Licorne
Ce conte a été inventé dans le cadre d’un projet d’écriture par cinq élèves de la classe de CM2 de l’école Georges Debono à Sermaise (91).
Julie, Blandine, Marshal, Ronan, Aude ont ainsi écrit ce conte
L’histoire d’un Cavalier qui sauve une belle Licorne...
Il y a bien longtemps, dans la forêt de Brocéliande, vivait un cavalier.
Ce cavalier, âgé de vingt ans, était particulièrement beau. Il adorait les Licornes et son voeu le plus cher était d’en rencontrer une, et peut-être même d’en avoir une rien que pour lui.
Un jour, il entendit dire qu’une Licorne habitait dans la forêt. Tout de suite, il voulut aller la chercher ; mais il se retint car une affreuse sorcière habitait le château qui surplombait cette forêt.
Un jour, il rencontra un vieil homme qui lui confia que cette forêt était remplie de pièges dangereux, de bêtes épouvantables comme par exemple les Folliards, petits diables aux griffes pointues et que pour la traverser il fallait une puissante bête. Le vieillard lui murmura à l’oreille où il pourrait en trouver une. Il apprit ainsi qu’il y en avait une dans une caverne lointaine. Le Cavalier alla jusqu’à la caverne dans laquelle il vit un chien à trois têtes. Il prit la corde qu’il avait dans son sac ; il y fit un noeud coulant et attrapa le chien. Ensuite, il décida d’aller dans la forêt.
Ensemble, ils entrèrent dans la forêt et tout de suite ils virent trois grottes. Deux d’entre elles étaient bouchées. Au dessus de chaque grotte, ils purent voir un dessin.
Sur la première et la troisième il y avait un ours et un cerf dessinés ; sur la deuxième apparaissait une Licorne. Et cette deuxième grotte n’était pas bouchée. L’ouverture était suffisamment grande pour qu’une Licorne puisse passer. Il ordonna au chien d’attendre dehors et il entra dans cette grotte. Il vit immédiatement qu’elle était occupée par une belle Licorne blanche aux beaux sabots. Le Cavalier s’approcha de la Licorne et il eut la surprise de l’entendre parler ; ainsi elle lui dit :
«Je veux bien t’obéir à condition que tu m’aides ».
Et elle lui expliqua que la sorcière du château voulait la capturer pour sa corne et ses ailes. Le Cavalier grimpa sur son dos et elle lui dit :
«tu feras de ma corne ton arme ! ».
Ils partirent à la recherche de la sorcière. La licorne qui connaissait bien la forêt lui expliqua qu’il fallait traverser des sables mouvants et que dans ces sables mouvants était enfouie la clé qui permettait d’enter dans le château. Ils trouvèrent sans trop de problème la clé et décidèrent de poursuivre leur chemin vers la demeure de la sorcière.
Ensuite, ils durent traverser une énorme grotte, et malheureusement une troupe entière de Folliards se trouvaient à l’intérieur. Ils se battirent très longtemps contre les diables aux griffes pointues. Ils les vainquirent et décidèrent de continuer leur marche.
Au bout de quelques temps, ils découvrirent le château somptueux, celui de la sorcière ; et ils essayèrent d’y entrer. Ils trouvèrent rapidement un petit passage secret et grâce à la clé trouvée dans les sables mouvants ils purent ouvrir la porte qui menait à la chambre de la sorcière. Ils la découvrirent endormie. Elle se réveilla immédiatement et essaya de leur lancer un de ses sortilèges, mais heureusement elle les rata et après un combat acharné, la Licorne planta sa belle corne pointue dans le coeur de la sorcière. Elle était enfin vaincue.
Le Cavalier rentra victorieux avec la Licorne dans son village et ensemble, ils célébrèrent la mort de l’horrible sorcière.
Plus tard, il se maria avec une très jolie femme qui adorait aussi les Licornes, et il adopta le puissant chien à trois têtes.
Le Lion et la Panthère
Ce conte a été inventé dans le cadre d’un projet d’écriture par cinq élèves de la classe de CM2 de l’école Georges Debono à Sermaise (91).
Clément, Charles, Amandine, Léna, et Aurélie ont ainsi écrit ce conte
C’est l’histoire d’une panthère qui se fait capturer par un méchant lion et qui réussit à se sauver, puis à sauver tous ses amis de la savane...
Il était une fois une belle panthère au pelage doux et soyeux et aux yeux verts. Elle vivait heureuse et était entourée de ses amis les Animaux de la savane et de Latira, l’enfant du village. Ils étaient gentils et sérieux.
Un jour, la Panthère qui courait à vive allure après une proie, tomba soudain dans un piège dressé par son ennemi de toujours le Lion. Un de ses amis, l’oiseau, vit la panthère tombant dans le piège et il alla jusqu’au village prévenir ses amis du danger qui la menaçait. Tous les animaux allèrent, le plus rapidement possible, alerter l’enfant du village, Latira.
Pendant ce temps, le Lion alla au piège et tenta de ramener la Panthère dans sa tanière pour la manger. La Panthère se défendit et se sauva.
Au village Tyr, l’enfant Latira, très inquiet, décida de préparer tous les animaux du village à aller sauver la Panthère. Ils se lancèrent tous sur les traces de la panthère, ignorant que celle-ci venait tout juste de réussir à échapper aux griffes du Lion. L’enfant Latira lança les chevaux à vive allure, tous les animaux amis de la Panthère étaient accrochés à la crinière des chevaux. Ils galopaient si vite, qu’ils ne virent même pas l’énorme piège creusé par le Lion et ils tombèrent tous dedans.
La Panthère, tout en s’enfuyant, vit que tous ses amis, les animaux du village, étaient à leur tour prisonniers de l’affreux Lion.
« Vite à l’arbre magique ! » pensa la Panthère. Cet arbre magique avait le pouvoir d’exaucer tous les voeux.
« Bonjour grand arbre magique, j’aimerais bien délivrer mes amis du village du méchant Lion, mais je ne sais pas où ils sont. »
L’arbre magique lui répondit :
« Regarde dans mon feuillage, tu verras tes amis emprisonnés et le lieu où ils se trouvent. »
La Panthère regarda attentivement et alla chercher ses amis. Elle courut pendant toute la nuit et au petit matin elle trouva la cachette du Lion. Elle attendit et au coucher du soleil le Lion sortit pour aller chasser. Juste au moment où il sortait de sa cachette, sa queue toucha celle de la panthère. Le Lion se retourna vivement et la vit. Il lui sauta dessus, elle se défendit et d’un violent coup de patte, elle lui creva l’oeil. Il s’enfuit hurlant de douleur et il mourut en chemin.
La Panthère délivra tous ses amis et devint la reine de la savane. Aucun lion ne les embêta plus jamais.
Fin.
Le clown Balourd
une histoire imaginée par Marie
Balourd est le roi des clowns. Avec sa chemise jaune à gros pois rouges et son chapeau pointu, dès qu'il arrive sur la piste, son gros ventre en avant, tous les enfants (et même les grands) éclatent de rire !
Mais Balourd en a un peu assez de faire rire juste en se présentant. Ce n'est pas drôle pour lui d'être si gros et de ne pouvoir sauter, ou faire des galipettes, ou encore des acrobaties, surtout pour lui qui rêve de pouvoir voler! Même ses amis du cirque se moquent gentiment de lui: "Balourd tu es vraiment trop gros pour jouer les oiseaux !"
Un jour, un nouveau clown arrive au cirque. Il s'appelle Baloune. Dans ses bagages il a plein de ballons de toutes les couleurs.
Le soir, juste après le numéro de Balourd, il passe parmi les enfants et propose des ballons.
Il devient vite ami avec Balourd et Balourd lui raconte son rêve: "Tu sais Baloune, je rêve un jour de pouvoir voler, comme un de tes ballons". Il a l'air si triste en racontant ça que Baloune ne se moque pas de lui.
Un soir, alors que c'est au tour de Balourd d'entrer en piste, un roulement de tambour retentit ! Baloune arrive sur la piste, juste derrière Balourd, avec des ballons dans les mains. Il les tend à Balourd en criant: "Bon anniversaire Balourd"!! Tout le public reprend: "Bon anniversaire Balourd!".
Balourd est heureux et surpris qu'on l'aime autant. Il prend les ballons que lui tend Baloune, sans savoir encore que ce sont des ballons magiques, des ballons d'amitié qui peuvent réaliser tous les rêves de celui qui les tient.
Le gros clown n'en croit pas ses yeux: dès qu'il a les ballons dans les mains, il décolle!! Il arrive tout en haut du chapiteau et tout le monde l'applaudit: "Bravo Balourd!! Bravo Balourd"!!
Puis Balourd rêve de venir remercier Baloune pour son beau cadeau, alors il redescend, et d'un regard il remercie son ami, juste avant de remonter encore, toujours plus haut!
La petite étoile d'arbre
une histoire imaginée par Marie
Juste une semaine avant Noël, une petite étoile du ciel n'arrêtait pas de scintiller dans tous les sens. Sa maman lui disait:
- Arrête donc un peu de clignoter comme ça! Que t'arrive-t-il?
- Maman, lui répondit la petite étoile, je veux être une étoile d'arbre!!
Sa maman la regarda d'un drôle d'air. Elle pensait que sa petite fille avait un peu trop chauffé des rayons et qu'elle perdait le sens stellaire.
- Mais qu'est-ce que tu es encore en train d'inventer? l'interrogea encore sa maman. Les étoiles d'arbre ça n'existe pas!
Et elle rentra dans de longues explications pour lui faire comprendre qu'il y avait des étoiles dans le ciel, dont elle faisait partie, qu'il y avait encore des étoiles de mer, qu'on pouvait apercevoir parfois se promenant le long des plages (sa maman n'était pas une très grande scientifique), des étoiles de neige, que l'on remettait à tous les bons skieurs, mais jamais, vraiment jamais elle n'avait entendu parler d'étoiles d'arbre!!
Alors, la petite étoile, qui avait été très très attentive, lui dit:
- Viens avec moi!
Et elle l'emmena jusqu'à un petit coin de ciel duquel on pouvait apercevoir toute la Terre et même quelques autres planètes comme Mars ou Jupiter. Là elle s'installa et, en tournant la tête vers sa maman, lui chuchota:
- Là! Regarde!!
Elle lui montra tous les sapins de Noël décorés d'étoiles dorées dans les rues d'une ville sur la Terre.
- Tu vois? Voilà les étoiles d'arbres! C'est là où je veux aller!
Petite lune de Noël
Petite lune de Noël
une histoire imaginée par Marie
La lune, derrière un gros nuage, essayait d'apercevoir la Terre. On lui avait raconté que cette nuit le Père Noël allait venir et elle ne l'avait encore jamais vu. C'est une toute nouvelle lune.
Elle espérait pouvoir lui être utile en éclairant les toits des maisons. Il ne fallait pas qu'il glisse ou encore qu'il se trompe de cheminées!
Mais ce nuage restait là, sans bouger.
- Ce n'est pas grave se dit-elle, si je ne le vois pas ici, je le verrais sans doute un peu plus loin, un peu plus tard.
Il faut vous dire que la lune, toute nouvelle qu'elle était, savait bien que la terre n'allait pas s'arrêter de tourner, même la nuit de Noël. Alors si elle ne voyait pas le Père Noël descendre sur les toits australiens, peut-être aurait-elle la chance de le voir lorsqu'il arriverait en Europe, ou alors un peu plus tard, en Amérique! Le nuage lui, ne pourrait pas faire ce long voyage.
Effectivement la petite lune ne s'était pas trompée! Juste au dessus de l'Europe le ciel était tout dégagé et elle avait une vue magnifique sur le vieux continent.
Enfin elle l'aperçut! Un tout petit homme habillé de rouge avec un grand sac sur l'épaule! Mais oui! C'était bien lui, le Père Noël!!
Et, bien qu'elle fut à des kilomètres de lui, la petite lune, qui éclairait de toutes ses forces le chemin du Père Noël, le vit se tourner vers elle et lui faire un clin d'oeil pour la remercier. La petite lune n'osait plus bouger!
Au matin, lorsque le soleil arriva sur l'Amérique la lune en le croisant lui dit tout simplement:
"Moi, je l'ai vu!! Joyeux Noël Soleil!"
Puis elle repartit vers une autre journée.
Le petit ver de l'espace
Le petit ver de l'espace
une histoire imaginée par Marine
Il était une fois un petit ver de terre qui s'appelait Lob. C'était un ver de terre comme les autres sauf qu'il n'aimait pas où il habitait. Ce ver de terre rêvait d'aventures et de danger, mais il ne savait pas où les trouver. Il avait beaucoup cherché: dans les catalogues, la télévision mais il n'avait rien trouvé.
Un jour qu'il s'ennuyait, une sorcière apparut et lui expliqua : "Si tu veux trouver l'aventure et le danger, il faut aller dans l'espace et pour cela, il faut le demander la permission au roi des vers de terre."
- Mais je ne sais pas où il habite ! dit Lob.
- Pour le trouver il te suffit de creuser le plus profond possible et toujours tout droit pendant deux jours.
Et la sorcière disparut. Lob rentra chez lui prépara sa valise. Puis il partit.
ll creusa pendant deux jours sans s'arrêter. ll était épuisé. ll s'arrêta et s'endormit. Le lendemain, quand il se réveilla, il était midi.
- Ouh la la ! zut ! je suis en retard ! s'écria Lob.
ll empoigna sa valise et repartit en courant. Il arriva enfin devant une grande barrière en fer, peinte en vert. Dessus, en lettres majuscules, il y avait écrit : DOMAINE DU ROI DES VERS DE TERRE
Lob s'exclama : "Ça y est, j'y suis !"
Le palais était tout en nacre rose et violette. Lob était émerveillé. Il contempla longtemps le palais. Mais le roi qui l'avait vu par la fenêtre le fit amener vers lui. Le roi se leva de son trône et demanda :
- Qui es-tu, minuscule ver de terre ?
- Je m'appelle Lob et je ne suis pas minuscule ! Je suis venu vous demander la permission d'aller dans l'espace où je trouverai l'aventure.
- Mais dites donc, minuscule ver de terre, on ne me parle pas sur ce ton ! Et il éclata d'un grand rire, car il avait vu que quand il appelait Lob "minuscule", ça l'énervait.
- Avant de pouvoir partir dans l'espace tu dois d'abord aller affronter les monstres de la peur. Si tu y parviens, alors je t'accorderai la permission pour t'envoler dans l'espace.
Aussitôt, les gardes empoignèrent Lob et l'emmenèrent devant une porte où ils lui dirent :
- Ici se trouvent les monstres de la peur!
Et ils s'en allèrent.
Lob entra. D'abord, il ne vit rien ; puis apparut de la fumée. qui se transforma en un monstre gigantesque phosphorescent. ll avait des yeux rouges, la peau verdâtre couverte de pustules. Puis le monstre devint plus laid encore. Lob dût fermer les yeux pour ne pas mourir de peur. Il pensa : "J'aimerais mieux qu'il se transforme en serpent".
Il ouvrit les yeux et à la place de l'horrible créature, il vit un serpent à sonnettes se dresser devant lui, prêt à le mordre. Lob comprit à ce moment-là que la bête n'était qu'une créature de ses cauchemars. Alors il cria:
- Tu n'es qu'une créature de mes rêves ! Disparais immédiatement!
Et l'horrible bête disparut !
Alors Lob sortit de la pièce en vainqueur. Dehors, les gardes l'attendaient. Quand ils virent Lob arriver, ils n'en crurent pas leurs yeux. Après, ils emmenèrent Lob auprès du Roi.
Le roi, stupéfait de tant de courage, accorda son autorisation et fit même fabriquer la fusée pour que Lob puisse partir visiter l'espace.
Quand la fusée fut terminée, Lob dit au revoir aux habitants de sa planète, il traversa la terre et le ciel des hommes et arrivé enfin dans l'espace il se construisit une maginifique île volante où il vécut heureux.
ll eut encore beaucoup d'autres aventures mais il n'a pas eu le temps de les écrire.
La petite pomme rouge
une histoire imaginée par Isabelle
L'automne arrivait et déjà les pommes rougissaient sur les branches du pommier. "Ce sera bientôt le moment d'être cueillies", se disaient-elles.
Une petite pomme déjà toute rouge s'impatientait et ne cessait de se répéter:
- Je crois que ce sera un beau voyage que je vais faire! J'en ai assez d'être attaché à cette branche. J'ai déjà tout vu et revu le paysage et il ne change presque jamais
Les autres pommes qui l'entouraient, plus grosses, plus sages et plus patientes lui disaient:
- Le moment viendra, cesse donc de t'agiter.
Or un matin, alors que la campagne se réveillait, il y eut de gros nuages dans le ciel. Puis un formidable coup de tonnerre. Et tout juste après un grand éclair. Le vent se mit à souffler, souffler.
Toutes les pommes s'accrochaient fort à la branche en se cachant sous les feuilles pour rester à l'abri de la pluie.
Voyant cela, de l'autre côté du verger, un petit escargot se décida à sortir se promener. La pluie, il adorait ça!!
Et le voilà parti, glissant dans l'herbe encore bien verte et tendre. C'était un vrai bonheur pour lui que tout cette eau.
Arrivé sous le pommier il décide de se reposer un instant.
Mais, au même instant un gros coup de vent souffla dans les branches du pommier et... ce qui devait arriver arriva: la petite pomme impatiente fut décrochée de l'arbre et après avoir heurté quelques branches sur son passage, elle atterrit violemment sur la coquille du pauvre petit escargot!
- Ouille! ouille! fit la pomme
- Aïe! Aïe! fit l'escargot
L'un et l'autre était bien mal en point.
Heureusement l'orage était déjà fini. Heureusement encore les enfants du village voisin arrivèrent avec leur classe pour étudier les champignons du petit bois derrière le verger. L'un d'eux, plus curieux que les autres, ou plus turbulent, s'approcha du pommier et aperçut la pomme et l'escargot.
- M'sieur! M'sieur! demanda-t-il à son instituteur. Regardez ce que j'ai trouvé!!
Puis il ramassa et la pomme et l'escagot et l'apporta dans son panier. C'était, pour lui, encore bien mieux que des champignons.
Voilà comment la pomme devint l'amie de l'escargot, sur une table au fond de la classe, bien à l'abri des intempéries.
Le petit nuage
Le petit nuage
une histoire imaginée par Rémy et Florian
Il était une fois un nuage très triste. Son plus grand plaisir aurait été d'arroser les champs, les arbres et les fleurs.
Mais il était à peine plus gros qu'une boule de coton. Les gros nuages noirs et gris, pleins de pluie étaient en colère. Ce petit bout de nuage au milieu les gênait.
"Bouge, vociféraient les gros nuages, nous devons arroser les forêts pour faire pousser les girolles, les trompettes de la mort et les trompettes chanterelles".
Alors, Cotonou, notre petit nuage partit encore plus triste qu'avant. Personne ne voulait le rejoindre.
Solitaire et triste, il poursuivit son chemin. Il était si triste qu'il se mit à pleurer.
Sa première larme tomba justement sur une fleur. C'était un joli coquelicot qui mourait de soif. Il regarda le ciel avec gratitude et sourit au petit nuage. Ce sourire mit un peu de baume sur le coeur blessé du petit Cotonou et il commença à conprendre qu'un jour lui aussi serait grand et qu'il pourrait arroser la terre et la faire fleurir.
Drôle de chat
Drôle de chat
une histoire imaginée par Souhaila
Un drôle de chat est tombé dans l'escalier. Il a glissé sur un glaçon que sa maîtresse avait fait tomber du bac en glace en se préparant un grand verre de jus d'orange.
On doit l'emmener à l'hôpital car il s'est cassé la patte. Il est très content parce que à la maison, il trouve que sa maîtresse lui fait trop de calins et ça finit par l'embêter.
À l'hôpital il est content! Il mange, il dort, il renverse les pots de fleurs et il essaye de croquer tous les poissons rouges, et il ne fait rien du tout pour sa rééducation.
Au bout d'un moment, il commence à s'ennuyer car ici personne n'a le temps de le caresser. Il décide donc de s'enfuir: il passe par les ascenseurs, se cache dans un chariot à médicaments, va jusqu'à l'accueil, se glisse derrière des gens et sort sans se faire voir.
Dans la rue il rencontre des chats de gouttière. Ils font les présentations: ils sont cinq et le chat de notre histoire s'appelle Tina.
Un monsieur qui passait les ramasse tous les cinq pour les emmener à la SPA [Société Protectrice des Animaux]. Là on leur fait des examens pour pouvoir les vendre, si ils ne sont pas malades.
La maîtresse de Tina arrive avec une de ses amies à la SPA pour acheter un nouveau chat.
Et là, quelle surprise! Elle reconnaît Tina! Elle est contente de le retrouver, c'est son chat adoré... Tant pis si il boîte un peu, il n'avait qu'à s'appliquer pendant sa rééducation.
Elle lui fait plein de caresses. Il est heureux car ça faisait très très longtemps qu'il n'en avait pas eues.
Il rentre avec sa maîtresse en ronronnant. Depuis ils vivent heureux ensemble et Tina fait toujours attention là où il met ses pattes!
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LES ANIMAUX EN POÈMES
L'ARAIGNÉE DU GOÛTER
Araignée du matin : chagrin
pensait un bébé coccinelle
cherchant à libérer ses ailes
Araignée du midi : souci
grognait un rat dans son chagrin
de voir un chat près de sa belle
Araignée du soir : espoir
disait au briquet l'étincelle
mourant dans le vent du jardin.
Mais l'araignée dans sa nacelle
Prisonnière à vie de sa faim
rêvait qu'elle était hirondelle.
Pierre Béarn
LA BALEINE
Quand la baleine
A de la peine
Un grand jet d'eau
Pleure à son dos
Et tant de larmes
Font tel vacarme
Que son chagrin
Soulève un grain
Et sa souffrance
Est si intense
Que ses sanglots
Salent les flots
Robert Vigneau
LE CHAT ET MISS LOLA
Moi le chat pacha gris blancInlassablement je te guette Miss LolaSouris rousse qui fuit tout le temps.Toujours à l'affût je suis là, Installé là ou passe le vent.Gare à toi sous le matelat,Roulé en boule, j'affûte mes dentsInlassablement je te guette Miss LolaMiny Doinet
Grosgnongnon le cochon
Grosgnongnon le cochon
rouspète en toute saison
Pour un oui, pour un non
Au printemps quand il fait doux
Il dit qu'il se sent tout mou
En été, quand il fait chaud
Et qu'il se met en maillot
Il se trouve un peu trop gros
Lorsque s'approche l'automne,
Grosgnongnon baille et frissonne.
Et, quand arrive l'hiver
Grosgnongnon est en colère :
Il n'aime pas son bonnet
Qui lui tombe sur le nez!
C'est ainsi toute l'année
Ce qu'il aime, c'est rouspéter.
Claude Clément
Le dromadaire
Avec ses quatres dromadaires
Don Pedro d'Alfaroubeira
Courut le monde et l'admira.
Il fit ce que je voudrais faire
Si j'avais quatre dromadaires.
Guillaume Apollinaire - Le bestiaire
L'escargot
Un escargot s'en allait à la foire
Pour s'acheter une paire de souliers,
Quand il arriva, il faisait déjà nuit noire
Il s'en retourna... nu pieds!
Un escargot s'en allait à l'école
Car il voulait apprendre à chanter
Quand il arriva, ne vit que des herbes folles
C'était les vacances... d'été!
Un escargot s'en allait en vacances
Pour visiter l'Inde et le Japon
Au bout de sept ans, il était toujours en France
Entre Dijon et... Lyon!
LA FOURMI
Une fourmi de dix-huit mètres
Avec un chapeau sur la tête
ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi traînant un char
Plein de pingouins et de canards,
ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Une fourmi parlant français,
Parlant latin et javanais
ça n'existe pas, ça n'existe pas.
Eh ! Pourquoi pas ?
Robert Desnos - Chantefables et Chantefleurs - Editions Gründ
LA GRENOUILLE
Une grenouilleQui fait surfaceCa crie, ça grouilleet ça agace.Ca se barbouilleCa se prélasseCa tripatouilleDans la mélasse, Puis ça rêvasseEt ça coasseComme une contrebasseQui a la corde lasse.Mais pour un héron à échasses,Une grenouille grêle ou grasseQui se brochette ou se picore, Ce n'est qu'un sandwich à ressorts.
Pierre Coran - Jaffabules - Livre de poche Jeunesse
LES HIBOUX
Ce sont les mères des hiboux
Qui désirent chercher les poux
De leurs enfants, leurs petits choux,
En les tenant sur les genoux.
Leurs yeux d'or valent des bijoux
Leur bec est dur comme cailloux,
Ils sont doux comme des joujoux,
Mais aux hiboux point de genoux!
Robert Desnos
L'IBIS
Un ibis avait un bec
Comme le sabre d'un cheik.
Aussi, notre volatile,
Au mépris des crocodiles,
Becquetait, becquetait-il
Des serpents le long du Nil,
Becqueta, becqueta tant
Qu'il mourrut en becquetant.
Dans le ventre de l'ibis,
On trouva deux tournevis,
Deux tubes de dentifrice,
Deux épingles à nourrice,
Deux étoiles de police,
Et deux balles de tennis.
Un ibis avait un bec
Comme le sabre d'un cheik.
Puisqu'il trouvait fabuleux,
De becqueter tout par deux,
De Port-Saïd à Tunis,
On l'appelait l'ibis bis.
Pierre Coran
LE JABIRU
Connais-tu
le jabiru?
Connais pas, connais pas!
Il arrive dans la rue
Le voilà, le voilà!
Ann Rocard - Petites comptines d'animaux, Lito
POUR MOI DIT LE KOALA
Pour moi dit le koala
Ce sera un Coca-Cola !
Et pour moi dit l’hermine,
Un lait grenadine !
Avez-vous des esquimaux ?
Interroge un lionceau.
Seulement des petits pots !
Répond le serveur corbeau.
A la framboise ! dit le gerboise.
Fraise-citron ! dit le lion
Michel Piquemal – Petites histoires, comptines et devinettes, Lito, 1994
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UN PETIT LAPIN
Un petit lapin
Se cachait dans le jardin
Cherchez-moi coucou, coucou
Je suis caché sous un chou.
Remuant le nez
Il se moque du fermier
Cherchez-moi coucou, coucou
Je suis caché sous un chou.
Frisant ses moustaches
Le fermier passe et repasse
Il ne trouve rien du tout
Et lapin mange le chou.
LA LINOTTE
Je suis idiote
dit la linotte.
J'ai oublié mes bottes,
ma redingotte,
et ma culotte.
J'ai froid à mes menottes
et je grelotte.
J'ai la tremblotte
en sautant sur mes mottes.
Mais je ne suis pas sotte,
je chante sur six notes
et sur ma tête de linotte,
je porte une calotte
couleur carotte.
Paul Savatier, Éditions du Centurion
LES OISEAUX
Les oiseaux
Quand ils chantent
Ce sont des gazouillis.
Quand ils dansent
Ce sont des tangouillis.
Quand ils bâtissent
Ce sont des nidouillis.
Quand ils barbotent
Ce sont des patouillis.
Quand ils ont peur
Ce sont des matouillis
Quand ils ont faim
Ce sont des granouillis
Mais quand ils aiment
Les oiseaux
Ce sont des bisouillis.
Joël Sadeler
LE POISSON ROUGE
Le poisson rouge
De mon école
A la rougeole.
Il ne veut pas
Que chacun voit
Ses boutons rouges.
Dès que l'eau bouge
Le peureux plonge
Sous une éponge.
Moi je connais
La vérité
Mais je me tais.
Le poisson sait
Que dans l'école
Je cache et colle
Mon chewing-gum
Sous l'aquarium.
Pierre Coran
UNE SOURIS DE TOUTES LES COULEURS
J'ai trouvé dans mes cheveux
Une souris bleue.
Dans mes cheveux une souris bleue ?
Encore bien heureux qu'il n'y en ait pas deux.
J'ai trouvé dans ma manche
Une souris blanche.
Dans ma manche une souris blanche ?
Dans mes cheveux une souris bleue ?
Encore bien heureux qu'il n'y en ait pas deux.
J'ai trouvé dans mon pantalon
Une souris marron.
Dans mon pantalon, une souris marron?
Dans ma manche une souris blanche ?
Dans mes cheveux une souris bleue ?
Encore bien heureux qu'il n'y en ait pas deux.
LE TAMANOIR
Il fait noir, dans le manoir
Se disait un tamanoir.
Il alluma sa bougie
Et devinez ce qu'il vit
Un chat noir
Sur une poire
Un noix
Sur un p'tit pois
Un oiseau
Sur un poireau...
Personne ne va me croire
Si je raconte mon histoire
Se lamenta le tamanoir.
Monique Hion - Comptines insolites
Les Petits Bonheurs - ACTES SUD JUNIOR
DEVINETTES POUR TIRER LES VERS DU NEZ
Sais-tu ce qu'est... un ver de mer ?
- Ce n'est qu'un ver de terre,
Un ver pataud, lourdaud,
Qui s'est jeté à l'eau.
Sais-tu ce qu'est... un ver éteint ?
- Ce n'est qu'un ver luisant
Qui trop tard a payé
Son électricité.
Sais-tu ce qu'est... un ver heureux ?
- C'est un ver solitaire
Qui a pris pour ami
Un long macaroni.
Je t'en ai dit assez.
Maintenant, je me tais.
Inutile désormais
De me tirer
Les vers du nez...
Carl Norac- Le rire des poètes, Livre de poche
LA VACHE
Si la Terre était une vache
Ce serait particulier
Les continents seraient ses taches
Elle brouterait la voie lactée
Tous les enfants vivants dessus
Auraient du lait à volonté
Ce serait la plus dodue
Des planètes répertoriées
La science serait tentée
De répondre à cette question
Quelle est donc l'utilité
De cette queue à l'horizon?
Pas besoin d'être ingénieur
Pour trouver la solution
C'est un grand ventilateur
Pour enlever la pollution !
Flem
Auteur, graphiste et illustrateur québécois.
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