Femmes chefs: des étoiles au firmament

 

 

On les trouve de plus en plus nombreuses dans les cuisines des grands restaurants. Leur cuisine, originale et délicate, est très appréciée. Rencontre avec ces cordons-bleus.

 

Derrière chaque grand chef de cuisine, on le sait, se cache une femme. Une mère ou une grand-mère, parfois les deux, sans qui Alain Passard, Michel Bras, Régis Marcon, Alain Ducasse, Georges Blanc et tant d'autres n'auraient jamais eu leurs trois étoiles au Michelin. Tous ces grands chefs sont unanimes pour reconnaître les grandes qualités de ces femmes qui non seulement leur ont donné le goût de la bonne cuisine mais qui leur ont également livré tous leurs petits secrets. Mais, à quelques exceptions près, ils ont bien des difficultés à reconnaître le talent de leurs contemporaines. Car, non seulement ces femmes-là savent "faire à manger" mais elles préparent des plats sains et généreux, mariant qualité et variation. Leurs cartes saisonnières ont remplacé les menus uniques de leurs grands-mères. Aujourd'hui, ces femmes chefs, ces héroïnes de la cuisine, ont mérité leur place à côté de leurs collègues masculins.

 

Si, il y a dix ans, les filles étaient très rares dans les classes de cuisine, elles représentent aujourd'hui un quart des élèves à l'école Ferrandi (Paris). Bruno Guesdon, responsable de la section "restauration" de cette école, se rappelle le temps, pas si lointain, où "quand on avait une élève à placer, on appelait un copain pour qu'il nous rende un service, sur l'air de 'Tu ne le regretteras pas.' Heureusement, les choses ont bien changé." Bien sûr, il y a toujours des chefs "machos" qui font de la résistance mais ils sont de plus en plus rares. Alain Ducasse, lui, estime que la cuisine de ces jeunes femmes est plus délicate, plus immédiate et plus sensible. On dit aussi que les femmes sont plus économes, organisées et passionnées.

À Belcastel, en Aveyron, Nicole Fagegaltier cuisine à quatre mains avec son époux. Entre mari et femme on ne parle pas de chef ni de second, mais c'est bien elle qui commande à l'Auberge du Vieux Pont. Cette restauratrice, âgée de 40 ans, refuse de croire que le sexe faible manque de créativité. Et elle le prouve, entre autres, avec ses délicieuses endives au caramel d'oranges. En revanche, elle reproche à ses collègues féminines leur manque d'ambition: "Elles disent que l'honneur et le pouvoir ne les intéressent pas et, comme récompense, elles se contentent uniquement de la satisfaction de leurs clients."

 

Annie Desvignes, qui a fondé l'"Association des Restauratrices cuisinières" en 1975, s'est battue pour rejoindre les vénérables "Maîtres cuisiniers de France", association dont le règlement interdisait tout simplement l'accès au sexe faible. Cette mesure discriminatoiren'est tombée qu'en 1997. Jusqu'à présent, Lydia Egloff et Nicole Fagegaltier sont les premières – et les seules – à partager la table de ces messieurs. En 2001, le club s'est encore illustré en rejetant la candidature d'Anne-Sophie Pic, la double étoile de Valence. À 46 ans, Lydia Egloff, dans sa "Bonne Auberge" de Stiring-Wendel, en Moselle, se moque bien de ces signes de distinction. "Quand une femme réalise quelque chose, on dit: 'Qu'est-ce qu'elle a encore inventé?' Un homme, on l'applaudit."

 

Rares sont les femmes chefs qui ont suivi un apprentissage dans les règles. Flora Mikula a eu beaucoup de mal à entrer dans l'école de cuisine d'Avignon. C'est une solide blonde, un peu brutale même, qui n'hésite pas à qualifier son métier de "dur, chaud et sale". Mais elle a une manière particulière de diriger son monde dans la cuisine où règne un climat de confiance plutôt qu'un rapport de forces. Chez elle, pas de coups de pied au derrière ni de régime dictatorial, mais plutôt la démocratie et la diplomatie. Tout comme chez Reine Sammut d'ailleurs, une crème de chef dont tout le monde reconnaît sa douceur et sa gentillesse. Cette ancienne étudiante en médecine avait appris la cuisine auprès de sa belle-mère, à Cadenet, en Provence. Petit à petit elle s'est éloignée de la tradition méditerranéenne pour créer des plats très personnels, très appréciés d'ailleurs par Paul Bocuse, le grand patron de la cuisine française. Bref, une cuisine de chef avec le charme d'une femme.

 

 

Source:  LExpress.fr

 

 

Questions

 

      1.    Où des grands cuisiniers, tels Alain Passard, Michel Bras, Régis Marcon, Alain Ducasse, Georges Blanc, ont-ils trouvé le goût de la bonne cuisine?

      2.    Qu'est-ce qu'un grand nombre de grands cuisiniers peuvent difficilement admettre?

      3.    Quelles sont les qualités de ces nouvelles cuisinières?

      4.    Quel est aujourd'hui le rapport filles-garçons dans les écoles de cuisine? Qu'est-ce que cela prouve?

      5.    Aujourd'hui, les jeunes femmes trouvent-elles facilement une place dans une grande cuisine? Pourquoi (pas)? Quelle était la situation il y a quelques années?

      6.    Qui cuisine à l'Auberge du Vieux Pont à Belcastel, en Aveyron? Qui est le véritable "chef"?

      7.    Que reproche Nicole Fagegaltier à ses collègues féminines?

      8.    En quoi l'association "Maîtres cuisiniers de France" est-elle discriminatoire?

      9.    Quelle est la réaction de Lydia Egloff face aux "étoiles" ou autres signes de distinction?

  10.    Comment Flora Mikula dirige-t-elle sa cuisine?

 

 

Discussion

 

  11.    "Derrière chaque grand chef de cuisine, on le sait, se cache une femme." On pourrait facilement remplacer le mot "chef de cuisine" par "médecin, écrivain, chercheur, etc." Qu'est-ce qu'on entend par cette expression "… se cache une femme"?

  12.    "Mais, à quelques exceptions près, ils ont bien des difficultés à reconnaître le talent de leurs contemporaines." Comment cela se fait-il que les hommes aient tant de difficultés à reconnaître les talents des femmes? D'après vous, existe-t-il des métiers typiquement masculins ou féminins? Pourquoi (pas)?

  13.    "Quand une femme réalise quelque chose, on dit: 'Qu'est-ce qu'elle a encore inventé?' Un homme, on l'applaudit." Avez-vous déjà vécu de pareilles situations? Si oui, à quelle occasion? Expliquez.

 

 

Pour présenter oralement ou par écrit

(Votre professeur précisera la portée exacte de chaque tâche.)

 

  14.    Cherchez (dans une encyclopédie ou sur Internet) l'origine du mot "cordon-bleu". Puis présentez le résultat de vos recherches oralement ou par écrit.

  15.    "Une mère ou une grand-mère, parfois les deux, sans qui Alain Passard, Michel Bras, Régis Marcon, Alain Ducasse, Georges Blanc et tant d'autres n'auraient jamais eu leurs trois étoiles au Michelin." 
- Qu'est-ce que le "Michelin"?
- Que représentent les "étoiles" au Michelin? Comment sont-elles attribuées?

  16.    Sur Internet, cherchez des informations sur les "Maîtres cuisiniers de France" et présentez cette association oralement ou par écrit.

  17.    "Nicole Fagegaltier … refuse de croire que le sexe faible manque de créativité." Dans une encyclopédie ou sur Internet, cherchez des informations sur une ou plusieurs femmes qui ont joué un rôle très important dans le domaine de la science, de la littérature, etc., et présentez le résultat de vos recherches oralement ou par écrit.

  18.    Sur Internet, cherchez des informations sur Paul Bocuse et présentez ce cuisinier extraordinaire oralement ou par écrit.

  19.    Sur Internet, cherchez des informations sur:
- l'Hôtel-Restaurant du Vieux Pont (Nicole Fagegaltier)
- l'Auberge de la Fenière (Reine Sammut)
- la Bonne Auberge (Lydia Egloff) 
- le restaurant Pic (Anne-Sophie Pic) 
- le restaurant La Tour du Roy (Annie Desvignes) 
et présentez un de ces établissements oralement ou par écrit.

  20.    Sur Internet, consultez les cartes d'un ou de plusieurs de ces restaurants. Quel menu choisiriez-vous? Pourquoi?